Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Atelier n°4


Proposition n°1 : Rédaction d'une liste 

Chacun fait une liste détaillée de 4 ou 5 "J'aime / J'aime pas". 


Proposition n°2 : Meilleurs voeux 

- Chaque participant pioche un papier plié indiquant une personne qui envoie ses vœux et le destinataire. 
- Il écrit une lettre de vœux, puis la passe (sans le petit papier) à son voisin. 
- Le destinataire écrit sa réponse à la lettre reçue. 

Proposition n°3 : Texte libre à partir d’une photo

Quelques textes du 4e atelier


Liste : "J'aime / J'aime pas" 

J'aime ne pas trop réfléchir et ça tombe bien puisqu'il ne faut pas trop réfléchir pour cet exercice. 
J'aime réfléchir. Oui, je sais j'ai dit le contraire précédemment mais j'aime l'esprit de contradiction. 
Je n'aime pas les poèmes que je ne comprends pas. 
J'aime le boudin noir et je n'aime pas le boudin blanc mais ça n'a rien de raciste. 
Je n'aime pas ne pas aimer mais j'aime assez détester sans nuance. 
J'aime peindre mais je n'aime pas laver les pinceaux. 
Je n'aime pas les journalistes français. 
Pascal 

J'aime les marrons grillés.
J'aime pas la soupe au potiron. 
J'aime les fauteuils club en cuir noir.
J'aime pas les chaises en plastique qui collent. 
J'aime les chats. 
J'aime pas les petits rongeurs idiots. 
J'aime recevoir de amis. 
J'aime pas faire la vaisselle quand ils sont partis. 
J'aime aller à la mer, même en hiver. 
J'aime pas avoir froid aux pieds. 
Vanessa 

Lettre de voeux 

Dieu envoie ses vœux à un couvent de bénédictines 

Mes très chères brebis,

Je vous souhaite une saison des fêtes magique, apaisante, et, pour tout dire, benoite. Ha ha ha! Elle n'est pas neuve, mais je ne peux pas résister, je la ressors tous les ans; et elle fait toujours rire notre ami Benoît. Il vous embrasse, d'ailleurs. 
J'espère que votre messe de Minuit sera aussi émouvante que celle de l'an dernier. Je sais que ce n'est pas à moi d'organiser mon anniversaire, mais si je peux faire une petite suggestion, que diriez-vous de décorer les murs du couvent avec des guirlandes électriques? C'est tellement festif, et puis ça se voit de loin. 
Je vous souhaite un joyeux Noël, et comme ça me met toujours de bonne humeur, je vous offre à chacune un voeu pour la nouvelle année. Mais n'abusez pas, je ne suis pas tout-puissant! Allons, trêve de plaisanteries. 
Je vous embrasse, mes brebis bien-aimées. 
Dieu (Vanessa) 

Le patron d'un bar envoie ses vœux à un de ses piliers 

Mon cher Dédé,

Je suis heureux de te présenter mes meilleurs voeux pour cette nouvelle année. Qui aurait pu imaginer qu'après tous ces décilitres de gros rouge dont tu t'es imbibé tout au long de cette année de crise, tu serais toujours en vie en décembre? Je dois dire que j'admire ta résistance physique et ton engagement sans faille dans l'alcoolisme. Pour ce qui est de l'aspect physique, c'est bien la seule chose que je puisse admirer vu ton aspect globalement diminué, avec ton surpoids et tes yeux vitreux. Je souhaite donc que ton foie tienne encore cette année. En ce qui concerne ton implication dans l'alcoolisme, je sais que c'est pour toi un travail de chaque instant auquel tu t'attelles sans jamais rechigner.
J'espère que 2013 sera une année placée sous le signe de la volonté et que tu iras aussi loin dans l'alcoolisme que tu le pourras, comme tu sembles le désirer. Bien sûr, j'aurais aimé te souhaiter bonne santé et bonheur mais ce n'est pas ce que tu sembles rechercher. Sache cependant que je serai toujours là pour toi et que, si un jour il te prenait d'entrer dans mon café pour y commander un Perrier citron, je ne te regarderais pas de travers et je viendrai même trinquer avec toi au Perrier citron.
Que 2013 réponde à tes attentes !
Ton ami, Jean-Paul (Pascal) 

Jean-Paul , mon cher ami,

Tes vœux me touchent et m’émeuvent. Je mesure, en les lisant, la force du lien qui nous unit. Un lien emprunt de respect, d’empathie et de sollicitude. 
C’est vrai que tu m’as toujours encouragé, entouré et poussé vers l’épanouissement de moi-même. Tout ce qui vient de toi est une bénédiction. 
Il y a 5 ans … ma femme qui me quittait pour te rejoindre. Depuis 2 ans … ma voiture, dont tu crevais les pneus et rayais la carrosserie. Et puis toute cette année, les courriers que tu envoyais à mon patron pour lui dénoncer de soi-disant malversations. 
Quand je repense à tout cela, je brûle d’impatience à l’idée de partager un perrier citron avec toi. Je te souhaite que 2013 ne réponde pas à mes attentes, elles te seraient fatales.
Dédé (Raphaëlle)

Une femme légère envoie ses vœux à un de ses nombreux amants 

Mon cher Jules
Je te souhaite une année 2013 pleine d’aventures exquises, comme tu as su m’en procurer tout au long de cette année écoulée.
Tu sais que tu n’es pas le seul, c’est vrai que la liste de mes amants est plus longue que le code pénal, mais je dois te dire que tu es de loin le plus inventif, et le plus endurant.
Pour cette année à venir, j’espère que nous continuerons nos petits jeux, et peut-être même pourront nous nous rencontrer en dehors de la chambre à coucher.
J’aimerais connaître ton âme aussi bien que ton corps, et ainsi, qui sait, vieillirons-nous ensemble…
Mais bien sûr, nous resterons libres, car je compte écrire très prochainement une encyclopédie du libertinage en dix volumes, et j’ai besoin de matière.
Très bonne année mon gros loup,
Ton agneau qui t’aime. (Mathilde)

Mon cher « agneau qui m'aime »,

À mon tour, je te souhaite une délicieuse année 2013. 
Si la liste de tes amants est « plus longue que le code pénal », l'énumération des noms de mes maîtresses prendrait plus longtemps que la lecture à haute voix de toute l'œuvre de Proust. C'est pourquoi il m'est difficile de visualiser ton visage, d'autant que j'imagine que ce n'est pas la partie de ton corps sur laquelle mes yeux se sont posés le plus longuement. 
Je suis bien sûr tout à fait partant pour que nous poursuivions nos ébats mais je dois malheureusement te décevoir. Je comprends que tu cherches à découvrir mon âme en dehors de la chambre à coucher mais ce que je fais en extérieur est strictement identique à ce que je fais en intérieur : seul le décor change. 
L'idée de vieillir « ensemble » est charmante. J'imagine que par « ensemble » tu entends toi, moi et les centaines de partenaires que nous avons. Nous vieillirons donc « en communauté ». Ceci te donnera de quoi remplir les pages de ton encyclopédie, ne serait-ce qu'en photos. Cela pourra également ajouter une dimension culturelle à notre relation. 
Dans l'attente de me souvenir de qui tu es, tous mes vœux ! 
« Ton gros loup » (Pascal) 


Un astronaute envoie ses vœux depuis sa fusée à son banquier

Quelque part entre la terre et la lune

Cher monsieur Bernard,

Veuillez recevoir je vous prie mes bien meilleurs vœux.
Quels que soient vos rêves… qu’ils se réalisent.
Je sais que nous avons eu quelques différends l’année passée. Vous trouviez déraisonnables mes projets de vacances sur la lune : « Quel besoin avez-vous d’aller si loin ? » m’avez-vous dit. « Allez donc en Bretagne comme tout le monde ! ».
En Bretagne. Quelle idée absurde et quel conformiste vous faites.
Bref. Je suis ravi que nous ayons finalement trouvé un terrain d’entente, et vous promet de libérer votre femme et votre chien dès mon retour.
Bien à vous,
Ralph (Raphaëlle) 

Monsieur Ralph,

Je vous renvoie vos voeux, je ne veux rien recevoir de vous. Plutôt mourir qu'être votre débiteur. J'en ai vu, des paniers percés; mais un puit sans fond tel que vous, jamais. Et voilà qu'après 34 dépassements de votre découvert autorisé, 25 mises en demeure et trois chèques sans provision, Monsieur le mauvais payeur monte sur ses grands chevaux, déboule à l'agence avec un couteau à fromage, menace la standardiste, et pour finir, m'envoie une demande de rançon ridicule. Je sais pertinemment, Monsieur Ralph, que vous n'avez pas enlevé ma femme. Elle vous a suivi de tout son coeur d'artichaut après que vous lui ayiez promis la lune. Quant à mon chien, c'est un vaurien; je vous le laisse.
Pour finir, sachez, Monsieur Ralph, que vous n'êtes plus client de la Supreme Banque Hyperactive. Je vous raie. Oui, Monsieur Ralph, je vous raie. C'est peut-être conformiste, comme vous dîtes, mais quel plaisir de voir votre nom disparaître de mon écran.
Un dernier détail : quand vous descendrez de votre fusée, vous serez reçu en grande pompe par une équipe d'huissiers.
Joyeux Noël, Monsieur Ralph.
Monsieur Bernard, 
Conseiller clientèle à la Supreme Banque Hyperactive (Vanessa)


Un cambrioleur envoie ses vœux à une personne qu’il a cambriolée 

(réponse)

Très cher Chat sur les toits,

Je vous souhaite aussi une très belle année, et sachez que j’ai été ravi d’apprendre que vous ferez bon usage du fruit de la vente des objets subtilisés dans ma maison.
Il se trouve que les avais moi-même « empruntés », du temps où je jouais petit, et où ce genre de larcin m’apportait encore de l’adrénaline.
À présent, je m’occupe essentiellement de braquage de banques ou de joailleries, je me suis récemment « produit » place Vendôme, avec une totale réussite, c’est pourquoi, voyant mon activité florissante, je souhaiterais embaucher un associé, et j’ai naturellement pensé à vous.
Si vous êtes intéressé, vous savez où j’habite.

Cambriolement votre, 
M. Hering (Mathilde)


Écrire à partir d'une photo 



Hypnose prophétique

Jenny regarde le tableau intensément. Toute son attention est absorbée par l'œuvre. Progressivement les couleurs se mettent à couler, à déborder, les formes à se mélanger et Jenny se sent rapidement projetée dans un monde irréel. Elle a la sensation de se tenir en suspension au dessus du temps. Elle peut maintenant sans effort s'extraire de l'instant présent et parcourir sa vie passée et future. Elle s'envole, légère puis doucement réintègre son corps tout en continuant de se laisser envoûter par l'hypnotisme du tableau. Elle sent derrière elle une présence pourtant elle ne la craint pas. Elle la connaît bien : c'est son avenir. Elle sait instinctivement que dans vingt ans elle sera ici, dans ce musée, devant ce même tableau et qu'elle se plongera dans l'œuvre pour revivre cette expérience extraordinaire. À nouveau elle sera projetée en dehors du temps et se contemplera, petite fille, telle qu'elle est maintenant.

Jenny et Jenny sont en présence l'une de l'autre, elles se sentent en communion mais ne se perçoivent que par le biais du tableau, un tableau qui représente précisément la scène que Jenny est en train de vivre, une scène en abîme, qui se reproduit à l'infini, comme un tourbillon séduisant dans lequel l'esprit s'engouffre avec délice au point ou l'on se demande si le tableau existe réellement, ou si tout n'est qu'illusion d'artiste.
Pascal 


Au Musée d'Art Moderne de ma ville, il y a une salle consacrée aux aquarelles. Et parmi ces aquarelles, il y en a une qui représente une maison exactement comme la mienne, avec un jardin comme le mien, des murs en pierre, des volets verts aux fenêtres, un toit de chaume, tout comme chez moi. Et à l'étage, derrière la deuxième vitre en partant de la gauche, on aperçoit une petite fille qui me ressemble.

Au Musée d'Art Moderne, où se trouve ma maison dans la salle des aquarelles, il y a une petite fille qui vient me voir tous les jours. Elle me ressemble, et elle dit que chez elle c'est tout comme chez moi.

La petite fille du tableau a les cheveux bruns; c'est la seule différence entre nous. À part ça, on pourrait nous confondre.

La petite fille du musée est blonde, comme sa mère. Je me demande si elle saurait nous distinguer.

À force que je vienne la voir au musée, la petite fille du tableau a eu la même idée que moi. Nous allons échanger nos vies.

Tiens, c'est bizarre, j'aurais juré que la petite fille sur ce tableau était brune. Un effet de la lumière, sans doute.
Vanessa