Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Atelier n°8


Proposition n°1 : Portrait chinois


Les quatre éléments :
- Si j’étais l’eau…
- Si j’étais l’air…
- Si j’étais le feu…
- Si j’étais la terre…


Proposition n°2 : Centon


Le centon est une forme poétique consistant à prélever des vers dans divers poèmes et les mixer pour constituer un nouvel ensemble.

Des recueils de poèmes sont à disposition sur la table. Chaque participant constitue un nouveau poème d’une dizaine de vers, à partir de plusieurs poèmes d'auteurs différents.

Proposition n°3 : À partir d’œuvres d’art

Quelques textes du 8e lundi


Les 4 éléments


Si j’étais l’eau, je serais la pluie de ton jardin.
Si j’étais l’air, je serai ton souffle. 
Si j’étais le feu, je serais celui qui te réchauffe.
Si j’étais la terre, je serais le sable du désert que tu foules.

Nicole H.


Si j’étais l’eau je serais une rivière qui coule vers son destin.
Si j'étais l’air je serais le vent qui porte l’odeur des fleurs.
Si j’étais le feu je serais une salamandre pour me nourrir de ses flammes.
Si j’étais la terre je serais le sol aride et brun des Cévennes.

Vanessa

Centons


(René Char, Yves Bonnefoy, René-Guy Cadou, Arthur Rimbaud, Charles Baudelaire, Alphonse de Lamartine, Stéphane Mallarmé, Louis Aragon, Arthur Rimbaud)

La terre nous aimait un peu je me souviens 
Comme était faible la distance de nos corps 
Je te regarde et tu souris sans mouvement
Et, dès lors, je me suis baigné dans le Poème
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent
Tout à coup des accents inconnus à la Terre
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages
Cachent-ils des éclairs dans cette lavande où
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.

Jacques-André


(A. Rimbaud – A la musique, E. Verhaeren – Les campagnes hallucinées, Les villes tentaculaires, V. Hugo - Voyage de nuit, G. Apollinaire - Calligrammes, P. Verlaine – Fêtes galantes, Romances sans paroles, G. Apollinaire – Alcools, T. Gautier, Non relevé)

L’orchestre militaire, au milieu du jardin,
Les jours d’hiver quand le froid serre,
Fait marcher quelque chose en écrasant quelqu’un
Qui se trouve au coin de la rue Saint Simon-Le-Franc.
Bien dans le ventre, mal dans la tête
Je me disais Guillaume, il est temps que tu viennes,
D’une main délicate,
En souriant,
Ouvrir cette porte.

Nicole


(Michaux, Verlaine, « haiku », Mabanckou, Rimbaud, Apollinaire, Prévert, Mabanckou, Hugo)

Infini incessamment qui tressaille
Et l’on voudrait pouvoir goûter la paix des cieux
Oies sauvages dans le ciel
Il parait qu’au-delà des collines point l’autre horizon
Pleurant, je voyais de l’or - et ne pus boire.
Mais pleure pleure et refluerons
La saison des pluies recommence
L’aube porte une balafre en plein visage
Et j’ai la nostalgie du soleil, mon ancien pays.

Vanessa


À partir d'une oeuvre d'art



Paul Gauguin « Aus Tahiti » - 1902

Le feu illuminait les visages, y traçant des ombres qui souriaient sombrement.
La nuit était venue tard, les oiseaux avaient tu leurs chants. Les femmes et les hommes ont commencé la Danse des Couleurs. Hymne à la Beauté environnante et ses ors, ses bleus saphir et les couleurs de l'espoir. Puis la Danse des Saveurs et ses accents de safran, de pivoines sauvages. Et, sans se concerter, hommes et femmes ont rendu hommage au Soleil des loups qui se miroitait sur la lagune.
C'est le moment choisi par le sorcier Mau- Mau, vêtu de sa cape orangée sur son vêtement bleu nuit, pour invoquer les Ancêtres. Cela frappe les esprits et fait renaître les Aïeux, les uns émergeant de la dune, les autres sortant des troncs de micocouliers. Fête mêlant morts et vivants dans une liesse collective. Les Anciens rient de leurs bouches édentées soulignées d'un rouge carmin.
Les enfants allument des feux d'espoir pour toute la tribu.
Seules, restées à l'écart, deux femmes semblent circonspectes. Qu'a-t-il encore en tête, Mau Mau, ce soir ? Elles se regardent. Leur échange muet complote un renversement d'alliance. L'une se substituera à l'autre, au moment de partager sa couche.

Un nuage passe devant la lune des Marquises.

Jacques-André





Sébastien, martyre de l’ambiguïté, muscles saillants et gestuelle gracieuse, accueille calmement les flèches sur son corps imberbe. Il oppose aux normes en armes un visage tourné vers l’intérieur, indifférent au sang qui coule, ailleurs, déjà. Ancien militaire, ses armes ont désormais la douceur de ses traits et sa semi-nudité. Sa part féminine a remplacé la virilité du soldat d’est elle qui triomphe des incroyants et exalte des peintres et leur public depuis des siècles.

Vanessa



Camille Claudel – Les causeuses, ou les bavardes ou la confidence, 1897


L’aimable conciliabule sur le banc de bois clair,
Elles mêlent leurs mains blanches,
Leurs longs cheveux défaits.

Leurs voix murmurent parfois ensemble
Les secrets, les aveux des amours manqués.
Leurs têtes alors se penchent pour mieux emmitoufler
Leurs paroles légères.

Elles se dressent soudain
Et leurs rires aigus percent l’air alentour.
Elles quittent les bosquets pour les buissons au loin,
Leurs tuniques s’affalent mollement à leurs pieds.

Nues elles sont et entrent avec prudence dans l’onde de l’étang.
Elles font naître des gerbes qui en cerceaux retombent.

La carpe étonnée sort la tête de l’eau
Et baille de surprise devant tant de gaité.

Nicole H.