Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Mercredi atelier n°10


Proposition n°1 : Tautogramme 


On écrit une ou plusieurs phrases dont tous les mots commencent par la même lettre. 

Proposition n°2 : Écriture subjective - le témoignage 


1er texte 

À partir de la phrase : « j’étais là M’sieur l’agent, j’ai tout vu. » 


2e texte

Chacun pioche un texte et écrit le témoignage d’une deuxième personne.
Texte commençant par « Ça ne s’est pas du tout passé comme ça ; en fait… »

Quelques textes du 10e mercredi


Tautogramme 


Ton tiramisu totalise tous les travers ténébreux et tendancieux des tomates, et tous les trépidants trucs des tulipes tropicales. 


Le témoignage 


Un témoignage

J'étais là, M'sieurs l'agent, j'ai tout vu. Je viens souvent ici, j'aime bien la Poste ; les gens critiquent, mais en fait c'est très bien, on achète des timbres, on retire ses colis, on discute avec les employés. Moi ça m'occupe, je viens presque tous les jours. Et donc j'étais dans le coin des machines, près de la porte ; je comptais mes pièces rouges pour voir si je pouvais m'offrir un carnet de timbres au tarif économique, j'avais fait un tas de pièces de 1 centime, un tas de 2 centimes et un tas de 5 centimes, je suis quelqu'un de très organisé. On me le dit souvent. 
Ah, oui, vous voulez savoir ce qui s'est passé avec la petite vieille (je dis "petite vieille", ce n'est pas méchant, je ne suis plus tout jeune moi-même), eh bien, je vais vous le dire. Oui, je vous le dis, ne vous énervez pas, on n'est pas aux pièces. 
Donc j'étais là, tranquille, il y avait trois clients à part moi, le jeudi matin c'est calme à la Poste. Et alors la petite vieille est entrée, toute petite avec son sac à main genre reine Elizabeth, elle a monté les trois marches clopin-clopant, elle était très vieille, vous comprenez, elle s'est approchée du guichet "banque postale des pros", et elle a sorti un flingue de son sac et elle a dit : "Donne-moi cent euros, pouffiasse !" C'est comme je vous dis. Et là c'est devenu complètement fou. Je ne sais pas ce que la postière lui a répondu, mais la vieille a crié : "Eh bien si c'est comme ça..." et elle a tiré dans tous les sens. J'ai eu la peur de ma vie. 
Voilà ce qui s'est passé, M'sieur l'agent. C'est la petite vieille qui a fait le coup. Elle a même tiré une balle sur la photocopieuse, et c'est dommage, parce que des fois, quand je n'ai pas besoin de timbre, je fais des photocopies... 

Vanessa 

 *** 

Un contre-témoignage


Ça ne s'est pas du tout passé comme ça ; je peux vous le dire parce que j'habite en face du père Bernard, la fenêtre de ma cuisine donne sur son potager. Je n'espionne pas les gens, moi, pas du tout, mais là j'avais lancé la cuisson du boeuf bourguignon, il y en avait pour une heure, il faut bien s'occuper. Donc pour passer le temps je regardais ce qui se passait dehors, à travers les voilages, par discrétion. 
Et là, effectivement, j'ai vu passer les gamins, les petits Berger et Boulains, mais ils n'ont pas pissé, ils ont juste cueilli quelques tomates pour les manger ; je ne dis pas que c'est bien, mais enfin, ce n'est pas la fin du monde. Non, le vrai problème est venu après, quand le Bernard est sorti tout nu en agitant un torchon, pour chasser les gamins de son potager. Je ne suis pas plus coincée qu'une autre, mais enfin, est-ce que c'est un spectacle, je vous le demande ? Il était donc tout nu avec son torchon ; les gamins sont partis en courant, ils riaient mais ils étaient un peu inquiets aussi. Et c'est vrai que le Bernard est de plus en plus bizarre. Ce n'est pas la première fois que je le vois tout nu, et franchement, je ne cherche pas du tout à le voir, mais que voulez-vous, je regarde parfois par la fenêtre. 
Et ce matin, non seulement il est sorti à poil, mais en plus, quand il a vu qu'il ne rattraperait pas les enfants, il a pris son... enfin sa... enfin, bref, il a arrosé ses tomates sans arrosoir ! Voilà ce qui s'est vraiment passé.

Vanessa