Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Atelier n°10


Proposition n°1 : Cadavre exquis…

...avec dernier mot apparent 


- La première personne écrit une phrase et la cache en laissant apparaître le dernier mot.
- La personne suivante poursuit la phrase ou en écrit une autre. Etc. 


Proposition n°2 : Écrire une histoire à plusieurs


Quatre tours, une demi-page chacun.       


Proposition n°3 : À partir d’une situation


La clé tourne dans la serrure, la porte s’ouvre…      


Proposition n° 4 : À partir de cartes du jeu Dixit

Quelques textes du 10e lundi


Cadavre exquis... avec dernier mot apparent


J'ai été appelé à l'extérieur dans la rue,
une rue ancienne, pavée, bordée d'immeubles fissurés pleins de cachet.
Un cachet chaque matin et chaque soir, a dit le médecin. 
Le médecin alla passer des vacances à...
l'île de Sein. Il y passa des vacances mémorables.
Le temps est mémorable et beau
Beau comme un camion!

On entend par la fenêtre le bruit des travaux 
Ralentir travaux, il est écrit. Ralentissons! 
Pour ne pas accélérer la durée de vie, il faut prendre son temps.
Le temps n'est pas compressible,
compressible tel un K-way ou une tente Quechua
Quetzal et tutti quanti.

Écrire à plusieurs



Cendrillon était une belle jeune femme qui faisait tout dans la maison. Jadis elle était heureuse, jusqu’à ce que sa belle mère s’installe à la maison. Cendrillon était devenue la bonne à tout faire. La bonne à tout faire de sa belle mère et de ses sœurs. (Sylvie)

De plus, Cendrillon était taraudée par la peur que ses ennemies découvrent son secret. En effet, la belle jeune femme était en réalité un charmant jeune homme. Son père l’autorisait à porter des robes, et, pour préserver sa bonne entente avec sa nouvelle épouse, il ne lui avait rien dit. À part lui, tout le monde croyait que Sandro était Cendrillon, la plus malheureuse des trois sœurs. Mais l’approche du bal princier était pour Cendrillon un nouveau danger. (Vanessa)

En fait, le malheur pour lui était de porter les chaussures de Cendrillon. Certes, c’était du lézard de première qualité. D’un beau vert émeraude mais difficiles à enfiler. Trop difficiles du fait que 35 était la taille des dites chaussures. Huit pointures en moins ! Sandro prit son courage à deux pieds et s’exerça avec quelque succès à la marche. (Jacques-André)

Non seulement les chaussures étaient trop petites, mais en plus elles avaient des talons hauts. Néanmoins, à sa grande surprise, il parvint à donner le change malgré la douleur et le déséquilibre que ces chaussures provoquaient à ses grands pieds. Mais Sandro était d’un grand courage, capable d’endurer n’importe quelle souffrance pourvu qu’il puisse faire croire aux autres « qu’il était bien dans ses bottes ». Le lendemain de cette soirée mémorable il alla sans prendre rendez-vous chez le podologue de son quartier.  Avec force massages et coupures d’ongles de pied, ce dernier put apaiser un peu la douleur de Sandro. (Patrice)

***** 

Il existe, au coeur de la grande ville, des territoires secrets, où les règles de la civilisation n’ont pas cours… Des îlots avec leurs propres lois, leur hiérarchie, leurs règlements de compte en lien avec leur culture spécifique. On appelle ces enclaves des « cours de récréation ». Là, entre bandes d’enfants, se jouent des complots ignorés des adultes. Ainsi, à l’école élémentaire Jean Jaurès, trois gamins réunis sous un marronnier tiennent un conciliabule. (Vanessa)

Petit-Jean, auto-proclamé « le Chef », dit que cela ne serait possible qu’à une seule condition: il se réservera 60% des gains, Bert etAmédée se partageant les 40% restant. Tous deux se regardent et s’échangent muettement le message: comme d’hab, quoi! Ils acceptent la proposition du chef. Sur ce, Petit-Jean leur intima de le suivre vers le casino, à la fin des cours. (Jacques-André)

Ils longèrent donc la plage de Deauville d’un pas alerte et décidé en plaisantant, en se faisant des croche-pattes, en insultant les vacanciers en maillot de bain qui se dirigeaient vers la mer. Quand ils arrivèrent devant le casino de Deauville, ils se dirigèrent vers l’entrée et voulurent entrer. Le gardien se campa devant eux et leur dit d’un ton autoritaire: « Le casino est réservé aux personnes de plus de 18 ans, et vous semblez n’avoir que 10 ou 11 ans! » Ils rebroussèrent chemin et allèrent se baigner dans la mer froide. (Patrice) 

Ils se baignèrent jusqu’à la nuit tombée. Et dans la nuit ils faisaient peur aux passant. Ils faisaient tellement peur que certains joueurs du casino firent tomber leurs gains. Les chenapans ramassaient les gains, fiers d’eux. Le lendemain ils racontèrent leur aventure, trop fiers d’eux. Ceci tomba dans l’oreille d’un père de famille, père de l’un des gamins, et ils furent mis en prison. (Sylvie)

*****

Un petit chaperon vert alla voir sa grand-mère. elle lui apportait du faux-beurre. C’est un leurre, dira Mère-Grand. En chemin elle rencontra un jeune loup, bien fringué, tiré à quatre épingles. "Alors, mignonne, lui dit-il, où est-ce que je t’emmène dans ma Jaguar?" Un jeune loup en Jaguar, ce n’est pas banal, pensa-t-elle. "Menez-moi au parc zoologique", lui intima-t-elle. (Jaques-André)

Quand ils arrivèrent aux abords du parc, le jeune loup gara sa Jaguar à Saint Mandé et ils se présentèrent tous les deux à l’entrée du parc. Quand il les vit, le gardien prit son téléphone et dit: « Eh, les mecs, il est revenu avec une petite fille qui porte un truc bizarre vert ». Trente secondes après on vit arriver une petite camionnette d’où descendirent deux colosses qui embarquèrent le loup dans la cage à l’arrière du véhicule. (Patrice)

Les deux colosses descendirent, plus loin, de la camionnette, et mirent le loup à la fourrière de la S.P.A. Après dix jours de fourrière le loup fut mis avec les chiens à la S.P.A.  et personne ne voulait l’adopter, parce qu’il paraissait trop méchant. De plus il n’aboyait pas, il hurlait et faisait peur à tout le monde. Les agents de la S.P.A. faisaient en sorte d’en faire un bon toutou, mais les mois passaient et il n’était toujours pas choisi. À la fin les agents de la S.P.A. faisaient en sorte de le récompenser à chaque fois qu’il faisait le beau. (Sylvie)

Le loup finit par comprendre qu’il ne pourrait échapper à ses geôliers qu’en se montrant plus futé qu’eux. Il fit donc semblant. Il ne se vêtit pas d’une peau de mouton car il n’en avait pas sous la patte, alors il adopta les attitudes des chiens; il fit le coup des yeux attendrissants et se laissa caresser le museau sans mordre. Ses efforts portèrent leurs fruits. Une sympathique famille pavillonnaire, mari, femme et leurs trois enfants, accepta de l’adopter. Les yeux mouillés par l’émotion les employés de la S.P.A. regardèrent partir le jeune loup dans la Renault Espace de sa nouvelle famille. Encore une touchante histoire d’adoption! (Vanessa)

*****

Pris d'une soudaine et irrépressible inspiration, il alla chercher du papier et un stylo et se mit à écrire rapidement un poème incompréhensible, même pour lui-même. Quand il eut fini, il prit son smartphone, lut à haute voix le poème et s'enregistra. Quand il écouta l'enregistrement, il fut tout surpris et ne put s'empêcher de penser qu'il était aussi doué que Rimbaud. (Patrice)

Mais il n'était jamais content de lui. Il aurait préféré écrire comme Verlaine. Il était quand même content de lui et fier d'être un poète. Il allait se fixer à présent d'écrire comme Verlaine. (Sylvie) 

Il se lança donc dans une série de poèmes au rythme impair, sur des sujets verlainiens tels que les tableaux de Watteau ou la Ville de Paris pendant la révolution industrielle du 19ème siècle. Étrangement, son recueil intitulé « Variations vagues » fut refusé par tous les éditeurs. On lui reprochait un manque de modernité, on questionnait sa pertinence dans la société actuelle. Il en fut fort marri. (Vanessa)

Marri ! Il aimait ce terme et son assonance avec l'époux. Oui mais l'époux infernal avec qui il avait partagé une vie nomade entre Paris, Bruxelles et Londres, n'était pas l'idéal. Il gambergeait, consultait des cartes, échafaudait des plans avant de s'embarquer vers Java d'où il déserta et revint laborieusement au bercail chez la Mother tant aimée en dépit de tout. Adieu Verlaine, vaches, cochons et partir vers l'Ailleurs ! Enfin. (Jacques-André)


À partir d'une situation

La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre... 


 La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre. Le chien s'ébroue, émet un petit cri et s'en va. Adeline, la maîtresse de maison, tend posément ses lèvres qu'il accueille comme il se doit.
Quel plaisir de retrouver le calme, l'intimité et le rien-faire ! Il prend le temps d'échanger avec Adeline avant de regarder le tableau abstrait figurant néanmoins un bord de mer. Que dirais-tu d'une virée en Bretagne ? Adeline accueille la proposition avec joie. Le souvenir des rochers dans la mer, les vagues d'écume, le couchant sur le sémaphore lui reviennent instantanément.

La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre. Là sont entreposés les cartes, les brochures et les livres de voyages. Allan saisit le guide Bretagne Nord qu'il consulte distraitement avant de se mettre à la préparation du repas. Demain, je passerai à la banque, annonce-t-il. Le lendemain, à la banque, il se fait conduire à la salle des coffres.

La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre. Il est toujours émerveillé comme un enfant un soir de Noël lorsqu'il soupèse les liasses de billets contenues dans diverses enveloppes de papier kraft. Il extrait deux liasses et referme la porte du coffre. Le loueur de voitures accepte très naturellement le règlement en liquide.

La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre. Le voilà à bord d'un véhicule Tesla qui le conduit jusque chez lui. Adeline a préparé quelques bagages, confié le chien au voisin et sourit devant les perspectives de petites vacances en amoureux. L'automobile a choisi l'itinéraire...et vogue le navire !

Jacques-André

*****


Quand Céleste sortit de l’ascenseur au sixième étage de l’immeuble, elle eut la mauvaise surprise de constater que la lumière était éteinte. Elle chercha l’interrupteur comme une aveugle car elle était dans le noir le plus total. 

Il lui fallut palper tous les murs de l’étage et aussi les portes des appartements.

Quand au bout de trois minutes elle trouva enfin la minuterie, elle eut la deuxième mauvaise surprise de la soirée : la minuterie semblait ne pas fonctionner.

Que faire ? Il lui fallait en plus trouver quelle était la bonne porte…

Le numéro de l’appartement était le 64. Comment le trouver ?

Elle se mit à parcourir les abords des différentes portes et eut enfin la chance de tomber sur le 64.

Elle sortit donc la clef de son sac et réussit du premier coup à l’introduire dans la serrure et ouvrit la porte de l’appartement. Ce fut alors qu’elle eut enfin la surprise la plus inattendue de la soirée : l’intérieur de l’appartement était éclairé et elle entendit un «bon anniversaire Céleste » d’au moins une trentaine de personnes qui rigolaient comme des fous. Son mari, ses trois enfants et tous ses amis étaient là.

Folle de joie, elle apprit quelques minutes plus tard que l’obscurité avait été volontairement organisée par son mari, histoire de rendre la surprise…. encore plus surprenante. 

Patrice


À partir de cartes du jeu Dixit


On lui reproche d'avoir la tête dans les nuages. L'escargot répond qu'il a un rêve: il veut gravir cet escalier en colimaçon à l'image de sa coquille, cette volée de marches menant on ne sait où; il veut la gravir jusqu'au-delà des nuages. Il y passera le temps nécessaire, sa vie entière, peut-être, et un jour il verra au-delà des nuages.
Pour commencer, il se hisse sur la première marche, admire la nouvelle perspective, et se repose un instant avant d'attaquer la deuxième marche. La-haut, les nuages l'attendent.

Vanessa

D’où ce monstre marin peut-il bien nous venir ?
D’une intense couleur verte son corps nous impressionne
Il se couche sur le sable à côté du menhir
Et ouvre sa grande gueule dès que la cloche sonne
Ses dents blanches acérées entourent ses mâchoires
D’où survient brusquement dans la douceur du soir
Un petit prince rose qui s’envole vers le ciel
Attiré par la vue d’une princesse très belle

Patrice

Dans le pays de Khorsand vit un enfant qui se prend pour un rongeur-artiste. Le petit palais dans lequel il passe ses journées ne laisse de l'impressionner. Les pièces tout autour sont immenses, peintes de couleurs vives. L'ouverture sur l'extérieur donne sur un ensemble de bâtisses propres à faire naître les contes.
L'enfant a un passe-temps : jouer de la flûte, mais cette flûte a pour originalité de se transformer en un gentil serpent !
Le gentil serpent patiente le temps qu'il faut avant de proposer une sortie. Pour l'occasion le serpent décore le cou de l'enfant. Ils vont au souk, y achètent qui un loukoum, qui une petite souris, enfin toutes choses à déguster en se promenant.
Par hasard ils rencontrent le Chef de Khorsand, richissime magnat magnanime.
Que désirez-vous par-dessus tout ? leur demande-t-il.
Ils se gardent bien d'émettre quelque souhait que ce soit car ils savent qu'une réponse qui ne conviendrait pas au magnat magnanime... leur assurerait la geôle. Ils sourient et se retirent tout en s'inclinant respectueusement et vont reprendre leurs activités au petit palais.

Jacques-André

Atelier n°9


Proposition n°1 : Acrostiches


- On prend un mot ou expression qu’on dispose verticalement sur la feuille 
- Texte dont chaque ligne commence par une lettre du mot choisi.
Exemple : chacun choisit un nom d’animal et écrit un texte à propos de lui.

Proposition n°2 :  Bouts rimés


- Chacun crée deux rimes (deux mots qui riment entre eux).
- On les tire au sort pour décider de leur ordre, puis on écrit un poème avec ces rimes imposées.

Proposition n°3 : À partir d’une photo


Bonus : Écrire à toute vitesse


Une personne lance un mot, et tout le monde écrit une phrase incluant ce mot. Puis un autre lance un 2e mot et chacun écrit la suite du texte en incluant ce mot. Etc.

Quelques texte du 9e atelier


Acrostiches

F   fouineuse par nature 
O   odorante à l’excès 
U   une sale réputation 
I   imméritée 
N   nul ne peut nier qu’elle est 
E   excellente chasseuse 

F   fourrure douce, petits yeux noirs
U   unis à un caractère joueur 
R   rien n’arrête cette bestiole des forêts
E   en animal de compagnie 
T   très tendance.

Vanessa

D   Dites moi, savez-vous où j’i caché mes 100 000 euros ? J’ai oublié
I   Inexorablement, si vous ne les retrouvez pas dans une minute, je vous les prends 
N   Non mais ça va pas ? Vous êtes un sacré filou mon père !
O   Oh non ! Dans ma religion, l’argent n’a pas de valeur, donc je vole avec zèle mais pas avec des ailes
S   Savez vous où je l’ai caché mon pognon ?
A   Ah, bien sûr mais je ne vous le dirai pas ! 
U   Utile, vous l’étiez avant. Aujourd’hui vous êtes un escroc !
R   Racontez moi plutôt votre croyance au lieu de m’insulter !
E   Et puis quoi encore ? Vous voulez en plus que je me confesse ?

Patrice


Bouts rimés


taffetas-tata ; guépard-tête de lard; éléphant-faon ; chocolat-entra ; feuille-deuil ; vertige-prestige ; utile-débile ; s'en va-reviendra ; chèque-tchèque ; étal-sale.

Quand je vis cette dame vêtue de taffetas
Je reconnus enfin ma bien aimée tata
Et je compris alors que j’étais chocolat
Quand celle-ci complètement nue entra
J’eus alors la colère d’un guépard
Et me mis à jouer la vraie tête de lard
Avec la lourdeur énorme d’un vieil éléphant
Et non la finesse d’un joli petit faon
De sa poche ma tata me sortit une feuille
Pour m’annoncer soudain qu’elle était en deuil 
Quand j’entendis cela je fus pris de vertige 
D’apprendre le décès de cet homme de prestige
Qui pendant toute sa vie fut un homme très utile
En face des crétins si méchants et débiles
Alors je déclarai à ma chère tata, s’il s’en va
Il est sûr que bientôt sur terre il reviendra
Nous apporter la joie et le bonheur d’un chèque
En revenant de Prague lui l’éminence des tchèques
Qui passera son temps à mettre sur son étal
Tout ce que l’être humain peut avoir de très sale

Patrice


À partir d’une photo





Ces vacances à Deauville se passaient agréablement.
Le gros des touristes était déjà parti, le casino ne faisait plus le plein et l'on pouvait profiter des planches à notre guise.

Nous y avions conduit nos maîtres. Il y a un temps déjà lointain, nous avions acquis un terrain sur les hauteurs et fait ériger deux niches. L'architecte y avait conçu des arrangements avec encorbellements du plus bel effet.
Du coup, nous avions aussi fait construire une villa à proximité de nos deux niches, « Villa Canis ». Ainsi, nous veillons sur eux et nos maîtres crient si un importun se manifeste.

Nous leur apportons à manger deux fois par jour. Ils ne désirent pas toujours nous accompagner au bain, préférant garder la propriété. Nous leur tolérons cela de temps en temps, sachant être bons avec les humains. Sinon, nous les emmenons le long de la plage. Ils sont grisés par la liberté retrouvée, sans leur laisse que nous leur retirons à cette occasion. Nos maîtres jouent au bord de l'eau, s'amusent à s'éclabousser, essaient d'attraper des gouttes d'eau dans leur bouche. C'est un spectacle qui connaît un vrai succès. Rentrés à la maison, ils ne demandent pas leur reste et s'endorment rapidement.

Nous fréquentons peu de monde. Non pas que nous soyons snobs mais tout de même. Nous consentons parfois à participer à une cani-party mais l'ambiance vite enfumée nous en éloigne rapidement. Nous sommes des chiens non-fumeurs, faut-il préciser.

Certains congénères disent que nous formons un couple vraiment bien assorti, nous trouvant même une ressemblance physique confondante. Les chiens disent parfois n'importe quoi !

Voici une photo que notre maître a prise il y a peu. Elle restera inscrite longtemps en nos mémoires canines.

En cette arrière-saison, il reste encore un peu de monde mais la plupart des niches ont déjà fermé leurs portes et leurs volets.

Qu'avons-nous vu ce jour-là qu'à ce moment précis nos maîtres ne pouvaient eux-mêmes apprécier tournant le dos à la scène pour prendre la photo ? Deux chiens tenus en laisse par deux humains !!!
Quelle décadence !

Jacques-André



À première vue cette photo pourrait donner à croire qu’il s’agit d’un chien à deux têtes. C’est en tout cas ce que Vanessa a exprimé.
En y regardant de plus près, il est vrai qu’on perçoit tout de même que ce sont bien des canidés… ou peut-être un chien à deux têtes, ce qui aurait conduit le photographe néerlandais ou flamand à jouer sur cette ambiguïté. 
Il faut reconnaitre qu’il n’est pas habituel de rencontrer deux chiens dans cette position. D’habitude les chiens ont des attitudes beaucoup moins poétiques et mystérieuses… 
C’est, je crois, la motivation du photographe. Je doute qu’il ait pu leur demander de poser pour prendre cette photo. Mais, sait-on jamais… on voit tant de choses aujourd’hui qui perturbent notre logique cartésienne.
Le photographe a volontairement concentré son objectif sur les deux clébards.
Au-delà des chiens le paysage est flou et pourrait laisser penser qu’il s’agit d’un bord de mer, de lac ou de fleuve.
C’est une façon de faire travailler notre imagination. Sans conteste, c’est le but recherché par le photographe pour rendre son cliché encore plus mystérieux et sortant vraiment de l’ordinaire. 
Comme par hasard c’est cette photo qui a été choisie aujourd’hui. 
Si nous avions choisi une photo plus neutre nous aurions pu partir peut-être vers une description romantique et poétique alors que là, nous sommes fascinés par les regards étranges des deux chiens.
Bravo au photographe qui nous a fait bosser pendant vingt minutes pour décrire son boulot. Ah ces hollandais ! Ils ont une imagination très développée. Eux qui vivent dans une grande platitude… géographique savent montrer une vraie profondeur dans leur quotidien.
Je connais bien ce pays avec lequel j’ai travaillé pendant des décennies.
Cela dit… si le nom n’est pas néerlandais mais flamand… je retire la phrase précédente.

Patrice


Atelier n°8


Proposition n°1 : Cadavre exquis  


Sur le modèle :
-  assertion commençant par « je... »
- explication commençant par « C’est parce que tu…


Proposition n°2 : Un objet se raconte


1er texte :
Chacun choisit un objet quotidien. L’objet raconte son histoire et sa vie présente à la première personne. 

2e texte :
Un autre objet vivant dans le même lieu donne son point de vue       


Proposition n°3   À propos d’une odeur

Quelques textes du 8e lundi


Cadavre exquis


Je vais aller me baigner à la piscine Joséphine Baker aujourd’hui. 
C’est parce que tu es un extra-terrestre dans un corps humain.

Je suis le meilleur.
C’est parce qu’à l’heure actuelle tu n’es pas très en jambe. 

Je donnerai tous mes biens à mon canari après ma mort.
C’est parce que tu as envie de connaître autre chose.

Bientôt je serai en voyage en Belgique.
C’est parce que tu n’y connais rien en ornithologie.

Je me suis longtemps assis de bonne heure.
C’est parce que tu as fait de longues études.

Je ne mange que des plats délicieux.
C’est parce que les conditions météorologiques te sont favorables, non?

Je suis une grande artiste d’art contemporain.
C’est parce que tu as un certain âge.

Je vais bien sûr te raconter l’histoire de la brebis Chouquette.

C’est parce que u refuses de suivre les règles.


Un objet se raconte


Je suis une cuvette de WC.
Je peux vous dire que j'en vois des vertes et des pas mûres, des beaux et des flétris. C'est la vie !
C'est ma vie de cuvette de WC.
A vrai dire, c'est plutôt reposant. Les propriétaires sont souvent absents. Ils travaillent. Paraît-il. Mouais! A mon avis, ils glandent beaucoup. Je dis cela parce que Monsieur revient souvent me rendre visite. Bon, c'est vrai aussi que le temps est une notion qui m'échappe.
Ce qui me plaît beaucoup, c'est l'heure de la toilette. Idalina, la bonne, m'a à la bonne. Elle m'envoie un bon jet de Canard WC et, délicatement, me brosse les joues, les lèvres et le fond de gorge. Là ça me chatouille. J'adore !
Surtout Idalina, ne me quitte pas !

Jacques-André


Franchement, je suis mort de rire. Ça fait dix ans que je le supporte jour et nuit. J’entends ces conversations sur les fesses de ses usagers noyées dans les gargouillis des bruits de chasse. Je ne sais pas pour qui il se prend, mais il pète plus haut que son cul.
Vu son activité professionnelle, il devrait être beaucoup plus humble ! Est-ce que je la ramène, moi ? Non, j’attends stoïquement qu’on m’effeuille puis qu’on remplace mon compagnon temporaire, le rouleau. 

Jean-Pierre


*****

De tous les habitants de cette boîte à lunettes, je suis celle qui a la plus longue et passionnante histoire.
Pour commencer, vous vous demandez peut-être ce qu’est une boite à lunettes. Je ne parle pas d’un étui élégant en simili-cuir, mais d’une grosse boîte en carton dans laquelle moi-même et mes consoeurs ont été jetées pêle-mêle au fil des années. Certaines ont été victimes des changements dans la mode féminine, comme la paire de lunettes papillon et celle qui marquait le retour des années 70 avec un format démesuré.
D’autres, comme moi, ont subi les changements de vision de notre propriétaire. Je suis une excellente correctrice de myopie, mais je ne prends pas en charge la presbytie. C’est ainsi qu’après six ans de service je me suis retrouvée dans la boîte à lunettes.
Et puis un jour la dame a rouvert la boîte et m’a ressortie! J’ai vu sur son bureau une parie de fines lunettes Armani en titane, cassée en deux. Armani ou pas, la qualité n’est pas toujours au rendez-vous… Devant le désastre, ma propriétaire a été bien contente de retrouver des lunettes solides, élégantes et bien conçues, à savoir moi-même. J’ai toujours su que j’étais au-dessus du lot. C’est ce que la vendeuse disait à tous ses clients:
« Oui, les Stepper sont un peu plus chères, mais la qualité est à ce prix. Voyez cette touche de doré sur les branches, ce motif écailles de tortue, cette forme légèrement ovale… D’ailleurs votre mutuelle couvre une grande partie des frais, et je vous offre en plus une paire de solaires. »
La paire de solaires a disparu l’été suivant sur la plage du Touquet. Mais moi je suis toujours là! Et ma propriétaire est bien contente de me retrouver. Ce matin nous avons même reçu un compliment, comme si nous étions une nouvelle paire. J’espère juste que sa presbytie ne s’aggravera pas trop vite; je ne tiens pas à rejoindre la grande boîte définitivement.
Mais il paraît qu’un jour nous serons données à une association et que nous partirons en Afrique. Ça me plairait bien. J’adore voyager!

Vanessa


Il nous faut avouer quelque chose de très douloureux : nous sommes un couple qui vit séparé depuis le début de notre existence. Nous avons été inventées pour satisfaire les besoins soi-disant esthétiques de certaines personnes qui ne supportaient pas de montrer au monde entier qu’elles avaient des problèmes de vue.
Avant nous, les lunettes permettaient aux myopes, presbytes, hypermétropes et autres de pouvoir s’adapter à leur environnement. Les lunettes étaient toujours ensemble, posées sur le même nez et les mêmes oreilles, aidant les mêmes yeux à voir de près, de loin, en haut, en bas… Si elles tombaient et se cassaient elles mouraient ensemble et pouvaient même être réparées.
Nous sommes les lentilles. Pour permettre à ceux et celles qui ne supportent pas les montures et les verres, on nous colle sur chaque œil. Encore une obligation induite par ces horribles êtres soi-disant humains. Il y aurait long à dire…

Patrice

*****

Quand je suis né j’étais au milieu des bois et n’avais aucune idée de ce que l’avenir me réservait. Vous me direz que j’aurais pu me réjouir de cet environnement mais… je n’ai aucune idée de la manière dont j’ai été conçu, et le doute subsiste toujours.
J’ai deux siècles aujourd’hui et les jours se suivent et se ressemblent depuis le début. Tout dépend de l’aspect extérieur de ceux qui me voient, me choisissent et m’utilisent.
Il y a les délicats qui se posent gentiment sur moi, il y a les indifférents qui n’ont aucune attention particulière à mon égard, et il y a les violents qui m’agressent et me font vivre les pires des supplices autant par leur arrivée brutale que par leur séjour plus ou moins prolongé sur mon dos. Imaginez que depuis deux siècles je passe ma vie à recevoir des fessiers de toutes tailles et de tous poids.
C’est pourquoi je préfère de loin les enfants qui, certes, bougent sans arrêt mais sont finalement toujours légers.
J’aurais quand même aimé servir à autre chose qu’à supporter le poids des êtres humains.
Je suis une chaise construite au 19ème siècle dans la rue du Faubourg Saint Antoine.

Patrice


Je trouve cette chaise bien arrogante. Après tout, elle n’est qu’un objet destiné à recevoir des fessiers, il n’y a pas de quoi se vanter. Elle se croit ancienne, mais le 19e siècle c’était hier. Pour ma part, j’ai été tissée et brodée sous Louis XV. Eh oui, louis XV, parfaitement! Je suis une nappe de grande beauté, d’un blanc crémeux bordée de dentelles délicates avec des petites fleurs rose pâle. On me sort pour les fêtes et on me lave délicatement, depuis quatre siècles.
Un jour j’ai subi l’affront d’une tache de sauce rouge (tomate, poivron et autres horreurs). On m’a aussitôt amenée dans un service d’urgence, où j’ai été tamponnées d’une poudre spéciale, re-tamponnée, puis relavée entièrement à la main. La tache a disparu, mais je garde des séquelles psychologiques de cet événement. Alors, les lamentations d’une chaise en bois, franchement, il en faudrait plus pour m’impressionner!

Vanessa

*****


Réponse au texte d'Annie sur les assiettes

Eh bien, elles en prennent de la place, les grosses. Il est vrai qu'elles sont en famille, ces assiettes. Mais elles ne sont pas aussi délicates que je le suis.
J'ai été offert le jour du mariage de Léontine et Albert, le 4 juillet 1950. Une belle journée. Les foins étaient passés. Albert avait décidé : « Ce sera le 4 juillet ».
A l'époque, pas de listes de mariage ni de tralala. Chacun venait et apportait de quoi se sustenter. La Berthe avait fait … une choucroute ! En plein été ! Tout le monde avait ri. Et tout le monde avait dégusté la choucroute.
Les cadeaux aux mariés étaient rares. Victor, le témoin d'Albert, « l'Instituteur » comme on l'appelait, avait offert un magnifique verre de mariage, en baccarat, avait-il précisé aux mariés. Ce nom exotique n'inspirait personne mais nul n'avait moufté.
Sur le verre, les prénoms de Léontine et d'Albert avaient été finement gravés. Des épis de blé, synonyme de richesse promise aux mariés, entrelaçaient les prénoms. Un « Oh ! » général avait surgi des gorges de l'assistance. Léontine avait rosi, Albert étreint Victor.
Passé ce moment de gloire, j'ai été longtemps posé sur le plateau de la cheminée. Léontine essuyait régulièrement le globe qui me protégeait.
Le temps a passé. On m'a remisé dans le placard, sans mon globe de protection, à côté de ces assiettes de céramique grossière. Pffff ! 

Jacques-André



À propos d'une odeur


Les temps étaient difficiles.
Ils vivaient dans un 23 m2 en plein quartier de Belleville. A l'époque – les années d'après-guerre – Paris, et a fortiori Belleville en particulier, n'avait pas encore connu les réhabilitations successives qui ont éliminé beaucoup de grisaille, de noirceur sur les murs de la ville. Parfois au moyen de destructions complètes pour rebâtir ou, à l'occasion, créer un immense parc, comme celui de Belleville, justement.
Les commerces étaient tenus par des individus qui géraient leur propre affaire, y mettant amour du métier et compétence avec les moyens du bord. Les supérettes n'existaient pas encore. Le quartier où ils habitaient connaissait ainsi un alignement de commerces tous plus variés les uns que les autres. Chacun s'efforçait de faire au mieux pour la décoration intérieure, avec des matériaux simples et de bon goût, destinés à faire oublier la grisaille à l'extérieur.
Eux deux travaillaient de longues journées, six jours sur sept. Restait le dimanche. Pour certains, le jour de la messe, pour d'autres, celui de traîner au lit.
Son grand plaisir à lui, au sortir du lit, était d'ouvrir la fenêtre par laquelle entrait l'odeur du pain frais et des croissants chauds. Simple bonheur dominical mais qui est resté en mémoire et transmis aux suivants.
Cette odeur de boulangerie, située juste en bas de l'immeuble, était de la couleur dans la grisaille, un temps de paix d'après bataille.
Généralement, c'était lui qui descendait chercher de quoi faire du petit-déjeuner une vraie fête partagée.
Ils en riaient, humant l'odeur entrée par la fenêtre, mordant avec délice dans la baguette croustillante et les croissants dorés, ceux-ci augmentant le goût du café chaud, lui-même révélant celui du pain.
Généralement, c'était suivi d'un retour au lit.

Jacques-André

*****

Je veux oublier toutes les mauvaises odeurs qui nous entourent et me concentrer sur celles qui m’ont aidé à construire mon goût pour les bonnes choses. Je ne parle ici ni des parfums ni des bons vins que j’aime. Non, je veux aider mon esprit à se souvenir des bonnes odeurs de la cuisine de ma maman quand elle préparait certains repas et en particulier un repas qu’elle confectionnait trois fois par an : la pkeila.
A priori les ingrédients de ce plat ne peuvent pas forcément susciter l’enthousiasme des narines : épinards, viande de bœuf, pieds de veaux ou de bœuf, coriandre, menthe, haricots blancs. Ce mélange provoque pendant sa préparation et sa cuisson une odeur venant du paradis… en tout cas dans ma mémoire.
Aussi longtemps que j’ai vécu avec mes parents et lors de mes visites régulières chez eux lorsque j’étais adulte, l’odeur de ce repas me ravissait subjectivement.
Epinards confits après avoir été tournés et retournés dans la poêle jusqu’à devenir noirs, mariage à priori inenvisageable avec la joue de bœuf, les pieds de veaux, les haricots blancs, la coriandre et la menthe. Peu de gens peuvent imaginer s’ils ne l’ont pas connu, quel parfum ce mélange improbable peut créer.
Pour moi c’est une odeur gravée au plus profond de mon corps et ma mémoire.
Pour l’anniversaire de ma fille qui aura lieu ce mois, j’ai décidé de cuisiner de nouveau cette pkeila pour essayer de faire découvrir à mes enfants et petits-enfants la magie de cette odeur divine. J’ai donc acheté tous les ingrédients et me prépare à passer au moins 4 heures dans ma cuisine.

Patrice

*****

À l’hôpital où je travaille, quand je sors de mon bureau vers midi (l’heure des traitements), mes narines sont envahies par des odeurs de cuisine collective. Je reconnais le gratin de chou-fleur, les lentilles, le poisson (blanc, probablement).Parfois c’est odorant mais difficile à deviner; parfois ça ne sent presque rien, parfois ça pue.
Et je retrouve mes impressions d’enfant puis adolescente puis étudiante, toutes ces cantines qui venaient à nous par l’odeur avant même qu’on y entre. Des souvenirs d’épinards et de foie qui repartaient intacts en cuisine, des frites les jours de fête, des plats traditionnels revisites à l’économie comme la blanquette de veau.
Et je songe à nos modes de vie actuels, aux établissements où on nous dépose quand nous sommes malades ou très vieux, où on nous sert à nouveau des épinards trop cuits, du poisson blanc et des endives, on on n’a pas le choix du menu, et je songe que je serai une bien mauvaise résidente, snobant la plupart des repas et me faisant apporter des pains aux raisins par mes visiteurs.
À moins de tomber sur un chouette établissement avec un potager et un vrai cuisinier, plutôt que des barquettes réchauffées au micro-ondes.

Vanessa

Atelier n°7


Proposition n°1 : Inventaire


Mes petits plaisirs quotidiens


Proposition n°2 : Exercices de style 


Comme dans le livre éponyme de Raymond Queneau, on part d'un texte court et factuel, et on le réécrit dans des styles variés.


 Proposition n°3 : Sur un thème


« Demain j’arrête… »

Quelques textes du 7e lundi

Exercices de style


Texte de départ


Un homme en pyjama ouvre la porte au facteur qui lui tend un colis. Il l’ouvre, en sort une paire de chaussures et constate qu’elles ne sont pas à sa taille. Un peu plus tard il prend une douche, s’habille, et se rend à la poste pour renvoyer son colis. Il ne l’a pas bien fermé, alors la postière lui tend un rouleau de scotch. L’homme répare son paquet et raconte l’erreur de livraison. La postière répond qu’elle n’a jamais eu ce genre de problème, peut-être parce qu’elle est du métier. L’homme profite de son passage à la poste pour acheter un carnet de timbres.


Joyeux


Charles-Hubert vêtu d’un magnifique pyjama rose accueille le facteur d’un large sourire. Celui-ci, charmant, lui remet un joli colis. Il l’en remercie vivement. Il essaie avec entrain les chaussures du colis. Tiens, se dit-il, je n’ai pas pu commander ces élégantes chaussures d’enfant. Bon, qu’à cela ne tienne, je vais les rapporter à la Poste, cela me promènera. Au bureau de poste, la délicieuse préposée l’aide à bien refermer le colis. Elle dit que son métier est formidable parce que voilà un incident qui ne lui est jamais arrivé et que cela rompt la routine. Sur le côté de son guichet sont proposés à la vente de très beaux timbres sur les régions de France. Charles-Hubert en achète deux planches.

Jacques-André

Déprimé


Que la vie est triste... Regardez ce pauvre homme condamné à livrer lettres et paquets jours après jour... Et cet autre homme, tiré de son lit à pas d'heure, les yeux cerclés de noir, pour recevoir quelque inutile colis. Et ne parlons pas de la poste, avec ses agents harassés et ses clients qui font la queue comme à l'entrée des enfers, poste où nous retrouvons le même homme aux yeux cernés avec son paquet, son rouleau de scotch, et ses déprimantes considérations sur notre société de consommation. Même la dame du guichet, qui se vante de ne jamais renvoyer un paquet, ne fait que souligner par ces mots la vacuité de sa vie et l'absurdité de celle de son client. Oh! que la vie des humains est triste!

Vanessa


Subjectif : le facteur


Paul est facteur depuis vingt ans. Ce métier commence vraiment à l’ennuyer.
Il en a assez de n’avoir comme interlocuteurs que les innombrables boites aux lettres. Il a donc demandé à ses supérieurs hiérarchiques s’il y avait une possibilité de rencontrer des êtres humains. On lui a donc proposé de livrer des colis, proposition qu’il a acceptée avec enthousiasme. Le premier jour de son nouveau boulot, il se rend dans un immeuble sans ascenseur et monte le colis au 6ème étage. Il sonne à la porte indiquée. Un vieux monsieur en pyjama lui ouvre et prend le paquet sans le remercier.
Il redescend à vive allure et continue son travail jusqu’à 14h, heure à laquelle se termine son service. Il mange rapidement un sandwich pour le déjeuner et retourne rapidement à la poste pour aller voir Eléonore qui travaille à la réception des clients. Paul en est amoureux. Platonique certes mais amoureux quand même. Il bavarde un peu avec elle, profitant de l’absence de clients. Soudain il voit arriver le monsieur qui était en pyjama ce matin avec le colis qu’il lui avait livré.
Ce monsieur veut renvoyer le colis car, dit-il, les chaussures qui lui ont été livrées aujourd’hui ne sont pas à sa taille. Il remet le paquet à Eléonore qui lui dit alors : « Monsieur, vous avez mal refermé le paquet» en lui tendant un rouleau de scotch. Elle parait très étonnée de cet incident qui ne lui est jamais arrivé.
Le monsieur du 6ème, porteur de pyjama, refait alors le paquet avec maladresse mais finit quand même par réussir. Paul et Eléonore le regardent avec étonnement.
Après avoir remis me paquet, M. Pyjama demande un carnet de timbres. Paul pousse alors un soupir de soulagement. Il va pouvoir enfin continuer à bavarder avec Eléonore.

Patrice


Roman noir


Quelqu’un frappe à la porte. Joe saisit son Mauser armé et, après un instant, ouvre violemment la porte.
— Qu’est-ce que c’est?
— Votre colis, Monsieur, répond le préposé.
— Ouais. Salut !
Il pose son revolver et ouvre précautionneusement le paquet. Encore un colis piégé ? se demande Joe. Non, des chaussures! De ville ! Moi qui ne porte que des Santiags. J’vais leur rendre ça fissa.
— Madame, faites pas suer, vous refermez votre colis vous-même ou sinon - et il fait mine de lui tirer dessus avec son index et son majeur pointés vers elle. Elle ravale ses réflexions et sa salive.
En partant, il chourave des planches de timbres, posées sur le côté du guichet et s’arrache vite fait.

Jacques-André


Quatrième de couverture


L'homme aux chaussures trop grandes (roman) par Leslie Pompadour
Éditions Mercure de France

Ce premier roman commence par un bouleversement dans la vie du personnage principal, qui n'est jamais nommé, lorsqu'il reçoit une parie de chaussures en taille 45 alors qu'il fait du 42. À partir de cet événement inattendu, les péripéties s'enchaînent, dans un style sobre qui contraste avec la profondeur du sujet, jusqu'à un dénouement bouleversant.
"Un chef-d'oeuvre d'observation" (le Monde des livres).
Ce roman a reçu le prix "envoyé par la Poste".

Vanessa

Tanka


Un facteur avec des chaussures
Un rouleau de scotch
C’est le métier
Un carnet de timbres.
Erreur.

Jacques-André

Romantique


Julien, tiré de son sommeil par le carillon délicat de la sonnette, ouvre la porte et se trouve face à une véritable apparition: un jeune homme au sourire enjôleur, qui lui tend un paquet comme on offre un cadeau. Encore sous le coup de cette rencontre, Julien ouvre son paquet et constate que sa commande n'est pas la bonne. Il en conçoit une joie profonde: il va avoir l'occasion de revoir Jessica la postière, et enfin, peut-être, de lui parler.
Julien est un grand romantique. Pour garder le souvenir de cette deuxième rencontre de la journée, il s'offre un carnet de timbres. Il les gardera toute sa vie dans son portefeuille.

Vanessa


Interrogatoire


— Papa, pourquoi n’as-tu pas mis tes nouvelles chaussures ? 
— Ils m’ont livré une paire qui n’était pas à ma taille ! 
— Avais-tu indiqué la bonne taille en commandant sur internet ? — Ben oui, j’avais bien indiqué la taille 48 ! 
— Mais papa, es-tu sûr que ta taille est bien le 48 ?
— En fait je ne sais plus quelle est ma vraie taille.
— Et alors, qu’as-tu fait ?
— J’ai rapporté le paquet à la poste !
— Et quelle taille as-tu commandé ?
— Ben, le 49… !
— Comment veux-tu pouvoir commander des chaussures sur internet si tu ne connais même pas ta vraie taille ? Papa, là, je trouve que tu exagères quand même ! Tu ferais mieux d’aller chez un vrai marchand de chaussures ! Là au moins, tu pourrais vérifier quelle est ta vraie taille. À mon avis, il vaudrait mieux que tu abandonnes les commandes sur internet, ou au moins pour les vêtements et les chaussures !
— Ouais, t’as p’têt raison ma fille.

Patrice

Rêve


Peut-être étais-je en pyjama, il me semble que oui. Un facteur me livre un pli recommandé. Ah non un colis, oui c’est bien un colis. Des chaussures de luxe à l’intérieur. Mais pas à ma taille.
Plus tard oui c’est ça je me retrouve à la Poste pour rendre ce paquet qui ne m’était pas destiné. Après je ne sais plus et je passe dans un autre milieu mais je ne me souviens plus bien. Entretemps je crois m’être réveillé, la queue du chat m’a chatouillé.

Jacques-André


Lettre officielle


Pour faire valoir ce que de droit

Monsieur,
Je souhaite porter à votre attention les événements suivants qui se sont déroulés de jour, lundi 13 mars, à 8h12 du matin. Un dénommé Julien S, résidant de notre immeuble depuis peu, a reçu un colis livré par la poste. Détail non négligeable, il a ouvert la porte vêtu d'un simple pyjama. Une heure plus tard environ, le susdit a de nouveau ouvert la porte, parfaitement habillé cette fois, le même colis sous le bras. Par souci de précision je me suis permis de le suivre, et je peux attester qu'il s'est rendu au bureau de poste de la rue du Rendez-Vous. Là je l'ai vu réparer son paquet avec du scotch et discuter avec l'employée. Je peux également attester qu'il a acheté un carnet de timbres.
Je me tiens à votre dispositions pour répondre à vos questions et vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées.

Signé: Monsieur X (Vanessa)


Glamour


Délicatement je me détourne du corps alangui d’Amanda pour aller ouvrir. La factrice me regarde de la tête aux pieds. Je m’aperçois avoir omis de me vêtir! 
— Oh, excusez-moi. 
— Non, non, tout le plaisir est… voici un colis pour vous.
Et elle tourne les talons après un regard langoureux. C’était une erreur. Dommage. J’aurais voulu que ces escarpins léopard fussent de la taille des pieds d’Amanda. Ah, les pieds d’Amanda 
J’enfile rapidement quelque chose et vais rapporter le colis au bureau de Poste. La postière, un parfum d’ambre musqué dans les cheveux, m’aide à refaire le paquet… Nos doigts s’emmêlent quelque peu, ce qui la fait rosir un brin.
— À la prochaine erreur de colis, me glisse-t-elle.

Jacques-André



Thème : "Demain j'arrête..."


Je suis tueur professionnel. Je pratique ce métier depuis 40 ans sans jamais avoir été inquiété. J’ai assassiné 500 personnes en France et à l’étranger.
Afin de ne pas éveiller les soupçons de la police, mon activité quotidienne est la mendicité.
Vous allez me demander : « Mais comment faites-vous pour obtenir vos missions ? »
En fait, en un endroit précis de Paris que je ne peux dévoiler et que je visite tous les jours, je reçois régulièrement un petit papier sur lequel figurent le nom et l’adresse de la personne à abattre dans un délai maximal d’une semaine.
Je ne connais pas la raison de ces meurtres à commettre. Simplement, j’ai besoin d’une semaine pour localiser et identifier la personne concernée, choisir le moment et le lieu pour faire disparaitre la personne désignée.
Pour réaliser ces actions je peux me servir d’une arme blanche, d’un poison, d’un véhicule mais jamais d’une arme à feu.
Quand j’utilise un véhicule que je vole au préalable, il m’est nécessaire de commettre mon meurtre la nuit dans un lieu désert pour ne pas risquer d’être vu par un témoin. Ensuite il me revient de nettoyer le véhicule à l’intérieur et à l’extérieur pour effacer toute trace de mon acte. Ensuite je l’abandonne dans un lieu éloigné de l’exécution.
Pour le poison, il suffit d’être dans un restaurant au même moment que la cible et profiter de la seconde où elle s’absente pour agir, tout ça, bien sûr sans être vu par le personnel du restaurant. Hier, j’ai failli me faire surprendre par le serveur au moment où je jetais la pilule empoisonnée dans le verre de vin de la future victime.
Heureusement j’ai réussi à m’éclipser discrètement, ayant déjà payé mon repas depuis quelques minutes.
Ah oui, j’oubliais : je suis payé en liquide avant chaque assassinat. Je n’ai pas de compte en banque et mes millions sont planqués dans un pays étranger dans un lieu que je suis le seul à connaitre.
Étant riche, très riche, demain j’arrête.

Patrice



Atelier n°6


Proposition n°1 : Texte à trous 


Un court texte avec des mots manquant, à remplir avec une contrainte: tous les mots doivent commencer par une lettre imposée.


Proposition n°2 : Critique de film


Chacun choisit une photo montrant un ou des personnages en action, en imaginant que c’est une photo de tournage ou tirée d’un film. Chacun rédige la critique de ce film fictif : son titre, son sujet, ce qu’on pense de la réalisation, de acteurs, du scénario...


Proposition n°3 : L’avis d’un spectateur 


En réponse au texte d’un autre participant, un spectateur qui a vu le film donne son point de vue : article de blog, courrier des lecteurs, intervention au Masque et la Plume…


Bonus: Écrire à toute vitesse


Une personne lance un mot, et tout le monde écrit une phrase incluant ce mot. Puis une autre lance un 2e mot et chacun écrit la suite du texte en incluant ce mot. Etc.

Quelques texte du 6e atelier


Critique d'un film fictif et réponse d'un spectateur






« Le vieux et le chien », joué par Jean Darmanin qui met en scène le film


Jean Darmanin joue avec le chien Hannibal, ils ont été très complices pendant ce tournage. Jean Darmanin joue très bien et dirige très mal les autres acteurs.
L’histoire : un vieil homme et son chien. Le vieil homme est parti de sa maison de retraite pour rejoindre son chien Hannibal. Hannibal était dans un chenil où son maître Gaspard est venu le chercher. Gaspard a donné rendez-vous à ses copains qu’il a prévenus qu’il faisait une fugue.
Et tout le film se passe au bord de la mer. Une équipe de choix a tourné le film avec les plus grands acteurs de leur génération.
Hannibal accompagne son maitre avec tous ses copains en Normandie. C’est une journée d’hiver où il fait très beau. Jean Darmanin joue très bien, mais il aurait pu s’abstenir de faire la mise en scène. La photographie est géniale, avec les paysages formidables de la Normandie. La musique est formidable, mais elle ne va pas avec le sujet.
On est passionnés par les aventures de Hannibal qui joue à merveille son rôle de chien.

Sylvie

***

Bonjour,
Je tiens à réagir à la critique du film « Le vieux et le chien » parue la semaine dernière dans votre journal. Je vous trouve sévères envers les acteurs, à mon avis ils se débrouillent très bien malgré le scénario indigent et la mise en scène prétentieuse.
Je suis d’accord avec vous sur le fait que Jean Darmanin est un mauvais metteur en scène. Mais comme acteur il est encore pire ! Dans le rôle du vieux sympa et touchant qu’il s’est attribué, il en fait des caisses. Il grimace comme un acteur du cinéma muet, chaque émotion est surjouée et encore soulignée pas une musique larmoyante, c’est insupportable. Je suis partie avant la fin, j’ai sans doute manqué un grand moment de tension dramatique (non, je plaisante !).
Le seul point sur lequel je vous rejoins est la qualité de jeu du chien ; de plus il est très beau et donne envie de courir avec lui au Parc de Sceau au lieu de perdre son temps dans une salle obscure à éplucher un navet.

Kelly Graphie (Vanessa),
Bourg-la-Reine 







Panique chez les aristos


On s’attendait au pire en recevant le dossier de presse de « Nos chères têtes blondes », la dernière comédie de Kévin Durillon.
Il nous avait affligés avec son buddy movie scatologique « Prout et Pétard », et ne s’était pas rattrapé avec sa comédie romantique « Quand Bichon rencontre Triton ». Son dernier film est donc une belle surprise. Le sujet n’est pas nouveau, mais il est traité avec une certaine finesse.
Une famille d’aristocrates voit son quotidien bouleversé par l’arrivée d’un nouvel enfant. Le bébé, blanc et blond comme ses sœurs à la naissance, devient de pus en plus basané au fil des jours. Les premiers cheveux tombent et sont remplacés par une chevelure brune et frisée. Les parents horrifiés voient leur enfant développer des traits typiquement maghrébins.
Évidemment le père soupçonne la mère, jouée de façon magistrale par Isabelle Huppert. L’aristocrate parfaite, maîtresse de maison accomplie et mère dévouée, a-t-elle trompé son mari ? Ou bien un gène plus ancien, entré illégalement dans la famille, est-il en train de ressurgir ? Le mélange de suspense et de comédie nous accompagne agréablement pendant une heure quarante, jusqu’au retournement final.
Pour la première fois je recommande un film de Kévin Durillon, qui semble avoir enfin dépassé les provocations adolescentes pour entrer dans l’âge adulte. « Nos chères têtes blondes » vaut le déplacement, dans le désert artistique de nos salles de cinéma en période de vacances scolaires.

Jean-Charles Mérinos (Vanessa), L’Obs







Rencontre au bout du monde


En voyant ce couple tenant, semble-t-il un bar, qui pourrait imaginer leurs histoires respectives de ces dix dernières années ?
Lui, Alfred était SDF à Paris depuis une dizaine d’années et passait son temps à mendier, assis en permanence devant une banque en buvant des bières à longueur de journée. Il interpellait les passants en leur racontant des histoires à dormir debout. La plupart des passants passaient devant lui sans lui adresser la parole ni même le regarder et à fortiori lui donner la moindre obole. 
C’était à se demander comment il parvenait à se payer les nombreuses bières qu’il consommait. Mystère…
Un jour pourtant, une dame généreuse lui remit un billet de 50 euros. Il se confondit en remerciements en des termes inhabituels et même un peu poétiques.
Sitôt la brave dame partie, il se leva d’un bond et courut au café-tabac du coin pour s’offrir un whisky et se payer un Cash. Lorsqu’il gratta le Cash, il n’en crut pas ses yeux : il venait de gagner 500 000 euros ! Une folle joie l’envahit. Dès qu’il eût perçu sa petite fortune, il décida de prendre un billet d’avion pour le pays de ses rêves, l’Australie
Dès son arrivée à Sydney il alla boire un verre dans un pub. Il vit une jeune femme assise seule à une table. Il lui demanda poliment en français s’il pouvait s’asseoir à sa table. Elle lui répondit dans la même langue : « mais avec grand plaisir cher monsieur ». Il fut surpris et enchanté. Ils entamèrent une longue discussion. En fait, elle était française, se nommait Alice et était seule dans la vie depuis qu’elle s’était installée en Australie.
Ils tombèrent très vite amoureux et décidèrent de retourner en France une semaine après leur rencontre. Ils ouvrirent un bar à Paris.
Voici donc Alice et Alfred au Sydney Club.

Patrice

***


J'ai vu Rencontre au bout du monde après y avoir été incité par la critique très exhaustive de Jules Cafard dans Le Provençal.
Je n'ai pas été déçu même si je ne crois pas avoir vu le même film que le critique. Au lieu d'un conte à l'eau de rose, j'y ai vu , moi, une analyse anthropologique du petit peuple.
L'addiction à l'alcool d'Alfred renvoie au désespoir éprouvé par les victimes de la mondialisation. Les illusions entretenues par un billet de loterie ne doivent pas faire oublier leur condition. 
Le tableau n'est pas aussi noir qu'il y paraît, et tend d'ailleurs vers le rose comme l'eau du même tonneau. Alfred et Alice ouvrent un bar, le Sydney Club, et servent beaucoup de petits canons, alors même qu'Alfred a décidé de n'en plus boire un seul.
C'est là une sortie par le haut de ces destins parfois tragiques, interprétés ici par deux acteurs totalement inconnus mais tellement vrais.

Jacques-André








"Le Réverbère", critique du film

Alexis Galuchon nous avait habitués à des films intimistes se passant à la campagne. Son dernier film, "Le Réverbère", change d'angle de vue pour nous projeter dans un univers urbain. Le choix du noir et blanc sied particulièrement bien à l'histoire.
Son titre ne laisse d'étonner étant donné que ledit Réverbère – pourtant présent sur l'affiche du film – n'apparaît que sur un seul plan. L'on aurait pu s'attendre à ce que l'objet en question nous éclaire d'une façon ou d'une autre sur l'action du film. Il n'en est rien.
Au contraire, Alexis Galuchon s'évertue à brouiller les pistes, à l'image de l'affiche où l'arrière-plan est nimbé de brouillard. L'action se situe au milieu des années 50 dans un pays jamais nommé mais que le spectateur reconnaîtra aisément.
Passées les premières images dénuées de toute action sinon la chute de neige continuelle, deux individus en grande conversation deviennent centraux au point que le plan se rapproche au plus près de chacun d'eux. C'est l'occasion de voir Hippolyte Girardot dans le rôle d'un espion de l'Est de haut vol. Son protagoniste, interprété par Bruno Podalydès, nous surprend tant par son jeu décalé que par ses prises de position proprement inscrites dans la ligne du Parti.
Ainsi donc, "le Réverbère" serait un film politique en écho à certains Costa Gavras ? Pas le moins du monde, car Alexis Galuchon saute entretemps d'une époque à l'autre, d'un destin à l'autre. Le spectateur, perdu en chemin, est récupéré in extremis vers la fin du film dont la chute ne peut être déflorée, car elle demeure tout l'intérêt du film que nous recommandons vivement.

Jacques-André





Réponse à la critique du film


Manifestement ce film qui met en scène des animaux en laine tricotée est, à mon humble avis un peu gnangnan.
Vision édulcorée d’un monde qui voudrait nous décrire une cohabitation pacifiée entre de nombreux animaux. Les êtres humains en sont absents.
Et, de plus, de manière étonnante et presque choquante, on trouve, accrochées au mur à gauche et à droite, deux têtes de cerf empaillées. Ces cerfs ont-ils été chassés par un ou plusieurs des animaux présents ou par l’homme ? Le doute existe en tout cas, semble-t-il.
La question : ce film est-il destiné aux enfants ? Pour ce qui me concerne, je n’amènerais jamais un de mes petits-enfants voir un tel film.

Patrice



Écrire à toute vitesse


Mots choisis par le groupe : lumière, chien, bouchon, lierre, dispute, disque, ile déserte


Et la lumière fut. Le chien de la maison, habitué à vivre dans l’obscurité, se mit à aboyer comme un fou. C’est sûrement un hasard mais le bouchon de la bouteille de champagne ne résista pas à ce bruit et explosa. Devant ces évènements le pot de lierre se fractura et la terre se répandit sur la moquette. Du coup, le couple qui vivait dans cet appartement entama une dispute violente sans raison apparente. Pour calmer tout ce petit monde, l’épouse mit le disque de Lucia Di Lammermoor et l’air de la folie calma l’atmosphère. De ce fait, l’intention de chacun d’aller s’isoler sur une ile déserte pour fuir cette dispute disparut comme par enchantement.

Patrice


Malgré son prénom, Stella n'était pas une lumière. Son chien bouledogue croisé chihuahua était beaucoup plus éveillé qu'elle. Il se nommait Bouchon, et c'est lui qui triait le courrier, répondait au téléphone et faisait la cuisine. Il avait aussi planté du lierre pour décorer la salle de bains et faisait pousser des plantes aromatiques dans la cuisine. Il n'y avait jamais de dispute entre Bouchon et Stella, grâce à une bonne répartition des tâches. La jeune femme était chargée de passer les disques lors des soirées, pendant que Bouchon réalisait les cocktails. Ils étaient tellement bien ensemble qu'ils auraient pu vivre tous les deux sur une île déserte.

Vanessa

Atelier n°5


Proposition n°1 : Les acronymes


Détourner les acronymes en leur donnant un sens nouveau.
OVNI ; CAPES ; SNCF ; PME ; VTT; RTT

Proposition n°2 : À partir de 4 mots


On prépare 4 tas de papiers où chacun pioche : 
- Une couleur 
- Un lieu  
- Un objet
- Une émotion


Proposition n°3 : À partir d’une dernière phrase


« Heureusement on arrivait dans la station, elle prit Eva par la main pour l’obliger à descendre. »
(Leslie KAPLAN, Le Psychanalyste)

Quelques textes du 5e lundi

Acronymes


OVNI : ouverture vers notre ineptie
SNCF : sachez nous chasser félons
CAPES : chamboulement après plusieurs essais simulés
PME : petite maman étonnée
VTT : votre téléphone tactile
RTT : réponse théocratique terrible
Patrice

À partir de 4 mots


vert, toilettes, surprise, vélo

Très peu de véhicules empruntent cette route bordée de peupliers. Il lui est donc loisible d'occuper toute la largeur de la route, de faire des zigzags voire du rodéo sur la roue arrière : aucun danger. Son vélo vert s'assimile si bien à la nature environnante qu'il disparaît dans le décor. 
Il se retrouve alors promeneur et prend un chemin de traverse. Le bruissements des insectes dans la chaleur de l'été, l'exhalaison des fleurs sauvages, le chant du ruisseau l'emmènent dans un espace poétique. La saison fait sa toilette. Les fées ne sont pas loin. 
Il trouve un point d'appui ombragé sous un haut châtaignier abritant un mégalithe moussu. Il rêve. 
Il rêve – surprise ! - d'une fourmi géante qui le regarde paisiblement. Il se hisse sur le dos de l'insecte qui parcourt le paysage à pas de géant. 
Voilà bientôt un bord de mer sous un ciel sans nuage. La fourmi géante a pris le chemin du retour. 
Il entre dans l'eau limpide et nage loin. 
Soudain... ses pieds reposent sur... un banc de sable ? Non... un sous-marin qui émerge. 
Il est invité à y pénétrer. Il n'a rien d'un engin militaire. Au contraire ! Les cloisons de couleur rose sont partout présentes. Les sous-mariniers sont revêtus de costumes Jean-Paul Gaultier en harmonie avec leur maquillage. Nulle tubulure, nul couloir interminable mais un agencement en bois d'acajou et une succession de petits salons d'agrément et alcôves. 
L'ambiance y est gaie, la musique de Pink Floyd en harmonie avec l'ensemble. Il découvre d'ailleurs un groupe de musiciens interprétant lui-même cette musique. Un concert dans un sous-marin ! Ce sera son meilleur souvenir.

Jacques-André 

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orange, boutique, jalousie, mitraillette

Ce matin d’hiver, la température était enfin devenue de saison. Ou presque…
J’arrivai comme de coutume avec une demi-heure d’avance. Après avoir bu mon café mensuel dans le troquet du coin, je décidai d’aller inspecter les environs.
Je vis un attroupement devant une boutique. Par curiosité je m’approchai rapidement du magasin en question. Il s’agissait d’une agence Orange. Il y avait une bonne centaine de personnes autour du local.
Tendant l’oreille, je réussis à entendre qu’une heure auparavant un individu était entré dans l’agence et avait massacré tout le personnel avec une mitraillette. 
Sa motivation ? La jalousie. Il avait entendu des rumeurs rapportant que son épouse, employée de l’agence, avait une relation avec son directeur. Le mari prétendument trompé avait fait d’une pierre deux coups : assassiné son épouse et son amant ainsi que les six autres employés présents. 
Eh ben dis donc, l’atelier d’écriture de ce lundi allait commencer dans une situation tragique. J’allais pouvoir faire fonctionner mon imagination sur la base de faits réels… mais aurai-je la solidité morale pour faire comme si de rien n’était ?

Patrice

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intranquillité, panthéon, violet, pince à cheveux

Après des années de concertations dans les plus hauts cercles de l'État, la décision a été prise: on va faire entrer au Panthéon une grande femme parmi les grands hommes, la célèbre philosophe Suzanne de la Minardine. "La nation reconnait la puissance et la pérennité de son oeuvre", a déclaré le chef de l'État. En effet, l'autrice de grands classiques comme L'Intranquillité de l'humanité, La Sécheresse du savoir ou encore L'Étonnement sans retour, est encore étudiée dans tous les lycées et universités de France.
Son corps a été acheminé à Paris depuis le cimetière provençal où il reposait. Il accomplit aujourd'hui son lent parcours vers le Panthéon, entre des rangées de curieux, de politiciens et de journalistes.
Le cercueil marque un arrêt à l'entrée du l'édifice, et le silence se fait. La ministre de la culture, qui a revêtu pour l'occasion un élégant tailleur-pantalon violet, monte les marches du Panthéon, se tourne vers la foule et prononce une allocution.
Les journalistes écoutent, à l'affut de la petite phrase à retenir, peut-être même de la grosse erreur qui fera gloser dans les rédactions. Mais la ministre tient son cap. Fait exceptionnel, elle a réellement lu les livres de la nouvelle panthéonisée, et elle exprime une admiration sincère. Déçus, les journalistes concentreront leurs articles sur la description de son tailleur Saint-Laurent et de ses cheveux retenus par une pince incrustées de brillants.
— Ça n'est pas Malraux, commente l'un d'eux.
— D'un autre côté, répond un autre, Suzanne de la Minardine, ce n'est pas Jean Moulin.
— Sans blague, dit un troisième.
La cérémonie s'achève sur ces considérations, et le cercueil de la philosophe rejoint enfin le sérail des grands humains auxquels la patrie voue une éternelle reconnaissance.

Vanessa



À partir d’une dernière phrase



Ce jour-là l'affluence au musée était tolérable. L'on pouvait lire les cartels au pied de chaque toile exposée et se permettre de s'asseoir si le cœur vous en disait.
La station assise était d'ailleurs parfois la plus appropriée devant des œuvres de 4 mètres sur 3. L'éclairage subtil plongeait dans les stries noires qui s'irisaient, modifiant la perception d'ensemble du tableau. À douze ans, Eva semblait hypnotisée et sa mère revenait sur ses pas afin de forcer l'allure. Les toiles de la première période plaisaient mieux à Brigitte cependant que les plus récentes la déprimaient quelque peu. Au contraire sa fille trouvait cet univers noir irisé d'un attrait irrésistible.
Toutes deux firent une halte avec la vue sur l'extérieur du musée. La ville se déployait, silencieuse, dans une lumière orangée. Eva n'en pouvait déjà plus de cette vision calme de la ville. Elle pensait qu'il s'agissait d'un gigantesque trompe-l'oeil et ne tarda pas à poursuivre la visite de l'exposition.
C'était une révélation que cette lumière obtenue à partir du noir qui la tourneboulait. L'imagination fit son chemin dans la tête d'Eva. Elle se représentait un environnement tout de noir vêtu, les visiteurs dans des costumes, des robes, sombres où scintillaient ici des boutons, là une broche ou une fibule. Leurs visages noirs éclairés par des iris dorés. Jusqu'aux murs de la salle d'exposition qui faisaient une fête à-la-Rimbaud. 
Brigitte observait sa fille qui lui déclara : Mère, que vous êtes belle, ainsi tout en noir ! - Que racontes-tu, pauvre folle ? Allons cela suffit, partons.
Elles sortirent rapidement du musée pour rejoindre le métro qui les ramènerait à la station Sèvres-Babylone. Pendant tout ce temps, Eva répétait : Noir, c'est noir, tout est noir. Noir c'est noir, tout est noir... Brigitte était horrifiée.
Heureusement on arrivait dans la station, elle prit Eva par la main pour l'obliger à descendre. 

Jacques-André

*****

— Les mains en l'air, personne ne bouge!
Les passagers du Paris Saint-Étienne levèrent la tête, sans hâte, avec le regard désabusé des employés en route pour le boulot. D'autres n'entendirent même pas et restèrent hypnotisés par leurs écrans et leurs oreillettes. La voix reprit, plus fort, nerveuse: 
— J'ai dit, les mains en l'air! On va passer parmi vous ramasser vos cartes bleues et vos téléphones.
— C'est une animation de la SNCF? demanda une dame. 
— Je ne crois pas, répondit son mari, on dirait plutôt un canular. Regarde si elles sont en train de filmer.
Car les assaillantes étaient deux femmes, une jeune qui brandissait un pistolet, et une plus âgée munie d'un grand sac en toile pour le futur butin. Elles s'approchèrent des passagers du haut du wagon et la plus jeune agita son arme d'un air menaçant. Un homme, craignant qu'elle ne tire au hasard, lui tendit son iphone. Mais les autres refusèrent de s'exécuter. Ce n'était pas un vent de révolte, plutôt une mauvaise humeur collective. "Déjà qu'on s'embête à prendre le train matin et soir pour gagner des cacahuètes, on ne va pas en plus se faire braquer.
La voleuse la plus calme, qui se nommait Odile, se tourna vers la plus jeune et chuchota:
— Ça ne marche pas Eva, on devrait lâcher l'affaire, on trouvera autre chose.
— Hors de question! cria Eva. Bande de radins, lâchez vos téléphones et vos carte bleues, sinon je tire!
Devant l'apathie du wagon, elle leva son arme et tira en direction du plafond. Un coffrage en plastique se détacha et tomba sur la tête d'un jeune cadre dynamique. Les gens commencèrent enfin à réagir, mais pas de la façon espérée. Une autre cadre, tout aussi dynamique, se leva et s'adresse à la prénommée Eva:
— Vous allez arrêter ça tout de suite! Personne ne vous donnera rien, on a tous nos soucis, alors laissez-nous tranquilles. 
Elle ne se laissa pas démonter devant le pistolet, et son calme encouragea les autres passagers. Celui qui avait donné son iphone tenta de le reprendre, mais Eva lui donna une tape sur la main. Tant pis, de toutes façons il pourrait le bloquer à distance.
Bientôt les deux assaillantes furent repoussées devant la porte du train. Pendant ce temps, certains appelaient la police, d'autres ronchonnaient sur le service déplorable de la SNCF. Odile sentait le danger monter. Heureusement on arrivait dans la station, elle prit Eva par la main pour l'obliger à descendre.

Vanessa

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Eva est une gamine de 12 ans. Elle est en cinquième. Elle avait une rédaction à faire dont le sujet était : « racontez votre dernière semaine de vacances l’été dernier ».
Quand le professeur de français leur avait donné ce sujet, tout de suite son esprit s’était bloqué avec plein de pensées négatives. 
En effet, l’été dernier, en juin plus précisément, ses parents s’étaient séparés brutalement et Eva, fille unique, s’était retrouvée au milieu d’un conflit violent où ses parents l’avaient complètement oubliée. Heureusement, sa grand-mère était venue la chercher et l’avait emmenée avec elle dans sa grande maison de Normandie. Elle avait passé deux mois à Trouville, à 100 mètres de la plage où elle allait tous les jours avec ses deux grands-parents.
Plus de nouvelles de ses parents qui continuaient semble-t-il à se déchirer, et avaient purement et simplement oublié leur fille.
On imagine facilement qu’elle ne profita pas vraiment de ses vacances, obnubilée par sa souffrance d’enfant abandonnée et n’ayant ni l’énergie ni l’envie d’essayer de lier connaissance avec des enfants de son âge.
La période de vacances terminée, les deux grands-parents retournèrent avec elle à Paris et décidèrent de la prendre avec eux dans leur appartement en attendant que la situation soit résolue. 
La dernière semaine avant la rentrée les grands-parents inscrivirent Eva dans le collège de leur quartier. Ils expliquèrent au principal que leur petite-fille quitterait le collège dans une ou deux semaines.
Le jour de la rentrée, Eva n’avait toujours pas eu de nouvelles de ses parents. Elle ne pensait qu’à ça bien sûr. Pas d’appel de leur part. Le corps enseignant fut informé de cette situation par le principal du collège.
De plus les grands-parents avaient tenté plusieurs fois d’appeler leur fille, sans succès. Malgré les nombreux messages qu’ils avaient laissés, aucun rappel. Après une semaine de collège l’esprit d’Eva commençait lentement à s’habituer au quotidien.
Lorsque le sujet de la rédaction fut donné aux élèves, elle fit une fixation et eut beaucoup de mal à finir son devoir. Elle passa la nuit précédant le jour J où elle devait remettre son travail à essayer d’écrire. Une vraie tragédie.
Le jour tant craint arrivé, sa grand-mère l’accompagna en tramway à son collège. Pendant le trajet, Eva se mit à pleurer. Elle semblait ne pas vouloir sortir du tramway. La grand-mère enlaça sa petite fille avec émotion. Heureusement on arrivait dans la station, elle prit Eva par la main pour l’obliger à descendre

Patrice