Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Quelques textes du 4e lundi


Monosyllabes


Cent jours que je vais au bal des gueux.
Six mecs sont là ce soir pour la fée Tah

Patrice

Oh la la la la la la la ! Quel beau temps ce jour… On pèle et on craint le froid mais le ciel est bleu, on est bien.

Vanessa

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Borborygme, valise, phacochère, neige, siphon, menthe, pierre, blanche, jambon, nuit, merci, yoga, souris, Arthur

Un borborygme s’est caché dans la valise. De ce fait, quand le phacochère l’a entendu, il a couru se cacher sous la neige pour se protéger du siphon qui pourrait en être la conséquence. Un diabolo- menthe commande Pierre au Café Lenoir à la station de métro Blanche. Et aussi un jambon pour que je puisse me nourrir cette nuit. Merci ! À présent je dois me rendre à mon cours de yoga car je suis très tendu ce matin. Cette nuit j’ai dû poursuivre une souris qui s’est planquée sous le lit de mon fils Arthur. Je n’ai pas pu la massacrer car elle a traversé le mur de manière inexplicable. Je suis sûr qu’elle va revenir cette nuit. C’est pour cette raison que je vais veiller avec mon sandwich.

Patrice


Il émet un borborygme sonore qui fait se retourner les voyageurs alentour. Il décide de prendre sa valise à main gauche et John, le phacochère, à main droite.
Il a la surprise en sortant de la gare de voir le sol couvert d'une neige épaisse. Il se dit qu'il faudrait un siphon géant pour absorber toute cette mousse très blanche et pas du tout couleur menthe à l'eau. Cela permettrait, pense-t-il, de découvrir les murs des immeubles et les branches du sapin de Noël qui trône devant la gare. Ah Noël, les repas somptueux sans jambon ni camembert !, les chants de Noël. Ô douce nuit... A tout cela il adresse un grand merci et John l'approuve d'un grognement léger.
D'un coup, il se met en position du lotus, tel que son professeur de yoga le lui a appris. Voilà que John l'imite à merveille, ce qui lui attire un franc succès. Il sourit. Il ne pense à rien. Il se dit « Ne rien faire, faire rien ». Une image s'impose à lui : c'est Arthur au désert.

Jacques-André


Plus que des murmures, c’étaient des borborygmes qui s’échappaient de la gorge de ces pauvres hères. Contre toute attente, il s’en trouva un, assez valide, pour soulever sa couverture et exhiber ses jambes pâles. Pour se donner du courage, il saisit sa peluche, surnommée phaco, chère à son cœur et, péniblement, se mit debout. A pas lents, il atteignit la grande fenêtre à barreaux et s’émut de voir tomber les blancs flocons de neige.
« Ainsi font font font les petites marionnettes », son enfance remontait. Il se rappela la cueillette de la menthe parmi les pierres blanches, l’escalade des arbres. Assis sur une branche, il dévorait le sandwich au jambon préparé par sa Mère. Et puis la nuit tombait et il murmurait « Merci ». Il se mit à rire soudain pensant à son acolyte qui, exceptionnellement, l’avait abandonné pour un cours de yoga. 
 — Yoga ! yoga ! Quel mot étrange… Jamais entendu !
Son ami sourit. Arthur se lança alors dans le détail de toutes les postures qu’il exécuterait pendant une heure.

Nicole


— Ça va pas être facile, ma p’tite dame ! s’écrie le plombier entre deux borborygmes. C’est qu’ils sont bien encombrés vos tuyaux, plus qu’une valise aux vacances d’été !
Accroupi sous l’évier, son corps de phacochère ne laisse rien ignorer de sa chute de rein. Il a le sourire du plombier, songe Neige.
— Et regardez-moi tous ces cheveux dans le siphon, pas étonnant qu’il soit bouché.
Neige n’apprécie pas cette attaque sournoise contre sa longue chevelure. Pour alléger l’atmosphère elle propose un thé à la menthe. Pierre se relève et accepte la tasse qu’on lui offre. Il préfère le café mais il ne dit rien, même quand une branche de menthe vient se coincer entre ses dents. Il se demande si la petite dame aura l’obligeance de lui acheter un sandwich au jambon ce midi. Avec tout ce qu’il y a à faire dans cette cuisine, il aura besoin de forces pour ne pas y passer la nuit. Mais ses craintes sont justifiées. Après le thé à la menthe il se voit proposer une salade de tofu.
— Merci bien, je vais m’acheter quelque chose, répond le travailleur.
Neige, qui est habituée aux professeurs de yoga et aux joueurs de luth, lui sourit sans malice.
— Dans ce cas allez chez Arthur au coin de la rue, c’est une grès bonne boulangerie vegan.
Le plombier soupire. Cette journée va être longue.

Vanessa


Vers une dernière phrase


Paris
Des lumières
Des jardins
Des fontaines
Des gens pressés
Des bâtisses onctueuses
Des bus dans un couloir
Des métros sous la terre
Et par-dessus tout ça
Une haute Dame de fer
Des nuages un ciel un avion

Paris
Des terrasses
Des cafés
Des musées
Des arcs de triomphe
Des théâtres bondés
Un opéra Garnier classique
Un opéra Bastille moderne
Et par-dessus tout ça
Le fantôme des batailles livrées
Les petites histoires et la Grande

Paris
Un fleuve
Des ponts
Des berges
Des péniches chargées
Des bouquinistes assis
Des livres du passé
Des images anciennes
Et par-dessus tout ça
La flèche de Notre-Dame
Les hautes statues d’airain

Dans une ville comme Paris on ne risque pas de manquer.

Nicole


Élise a toujours eu un tempérament d’entrepreneuse. Exaltée par les discours d’Emmanuel Macron avant sa première élection, elle a décidé de suivre ses exportations à devenir millionaire par la force de son travail.
— Quel genre de travail? lui ont demandé ses parents, des socialistes sceptiques. Une start-up?
— Quelque chose comme ça, a répondu Élise d’un ton vague.
Sans plus d’explications, elle a arrêté ses études de philo à peine entamées et a monté un plan d’action sur un cahier grand format à petits carreaux, le genre de cahier que sa prof de maths en terminale affectionnait. Merci à Madame Bachot de lui avoir appris à organiser sa pensée! Quand son plan a été suffisamment mûr, Élise a réuni ses trois meilleurs amies et leur a proposé de les embaucher.
— Nous embaucher pour faire quoi?
— C’est très simple. Nous allons cambrioler des bijouteries de taille moyenne, celles qui n’ont pas un super système de sécurité mais quand même de belles choses à emporter. Je pense qu’on pourrait aussi s’intéresser aux magasins de télévisions, ordinateurs et matériel, audio, ce genre de choses.
— On pourrait attaquer le Darty de Nation, a suggéré une des copines.
— Et en profiter pour emporter quelques sacs du Printemps, a dit une autre, c’est le même bâtiment.
Et c’est ainsi qu’Élise et ses amies sont devenue un gang de filles. Elles n’attaquent personne, elles ont pour seule arme une m-bombe lacrymogène au cas où quelqu’un les surprenne. Cela arrive parfois, mais pour l’instant elles ont toujours réussi à s’enfuir. Elles revendent leur butin sur internet. La police ne parvient pas à les reconnaître sur les caméras de surveillance, car elles savent se déguiser et elles changent de quarter à chaque nouveau coup.
Eh oui, l’entreprise individuelle est encore vivace en France, le président serait fier! Et les aventures du gang ne font que commencer. Comme le dit Élise à ses comparses pour les encourager:
— Dans une grande ville comme Paris, on ne risque pas de manquer.

Vanessa


Carolles est une petite commune de la Manche. Une de mes amies y possède une propriété somptueuse qu’elle a achetée il y a un an. De la maison on peut apercevoir la mer. En été, quand le soleil se couche, on aurait envie de se transformer en peintre impressionniste pour faire partager aux autres cette beauté de la nature. Le seul petit problème auquel mon amie doit faire face, c’est quand elle doit faire ses courses. Elle est obligée de prendre sa voiture pour se rendre à Granville où se trouve un hypermarché Casino.
Quand elle y va, elle revient avec une voiture pleine de nourriture et de boissons diverses. Récemment elle a rencontré un vrai problème en allant faire ses courses : les employés de Casino, inquiets de la fermeture probable de leur hypermarché, ont décidé de faire la grève en empêchant les clients d’entrer dans le magasin. Ces derniers ont alors dû subir un embouteillage historique. Ce jour-là, j’étais dans la voiture avec mon amie et nous avons attendu une heure et demie avant de pouvoir repartir et aller vers un autre hypermarché situé à 50 kilomètres de Granville. Toujours aussi peu diplomate, je grommelai :
« Dans une grande ville comme Paris, on ne risque pas de manquer » de nourriture, car même si Casino est en grève, on a plein d’autres possibilités.
Mon amie me dit alors
— Si t’es pas content, casse-toi et retourne à Paris ! Mais non, je plaisantais. Tu parles Charles !
Heureusement cet incident a été oublié et nous avons fait de belles courses que nous avons arrosées par un super apéro.

Patrice

Cadavre exquis avec dernier mot apparent


À bon entendeur, salut!
Salut les copains et les copines
Copines: Justine, Églantine, Martine
Martine au bord de la mer 
Mer qu’on voit danser le long des golfes clairs
Clairs matins de printemps et sombres soirs d’hiver
Hiver, saison froide de l’hémisphère nord.

Je ne sais quoi écrire, dit-elle
Elle se mit à pleurer, mais aurait été bien incapable de dire pourquoi.
Pourquoi, oui, pourquoi? Pour qui? Non, il faut s’y résoudre
Se résoudre à assassiner son voisin est une décision difficile
Il la prit quand même et l’exécuta…
…Puis pris d’un remord il prévint son entourage de son départ.
Départ, c’est le top final.

Après les embouteillages horribles provoqués par les travaux dans Paris, il décida de ne plus utiliser sa voiture
Voiture électrique et silence final, plaisir
Plaisir des yeux et des oreilles
Oreilles bouchées par l’eau de la piscine, sans parler de l’odeur du chlore dans les cheveux
Cheveux mon neveu, dit-il en zozotant
Zozotant, bégayant, suant à grosses gouttes, il se tordait les mains de désarrois
Désarroi, je suis pantois et reste coi.

Le phacochère guette sa proie dans la savane
Savane, le roi de la savane, c’est le lion
Lions, tigres et chatons, réunis pas un fort sentiment de supériorité féline
Féline, la marquise sortit à cinq heures
Heures légères du matin, heures laborieuses de la journée, heures graves du soir
Soir? C’est le soir qui tombe de haut
Haut les mains! s’écria-t-il en sortant un flingue.