Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Jeudi atelier n°5



Proposition n°1 : Cadavre exquis en 4 tours 


- Verbe à l’infinitif avec quelque chose en plus 
- « c’est » + autre verbe à l’infinitif + quelques mots 
- « c’est aussi… » 
- « c’est enfin… » 


Proposition n°2 : Réponse à une annonce "Copains d'hier"


Chacun choisit une petite annonce dans la page « Copains d’hier : aidez-les à se retrouver » d’un magazine pour personnes âgées. 
À partir des éléments fournis dans l’annonce, on écrit une lettre pour reprendre contact ou donner des nouvelles de la personne recherchée. 


Proposition n°3 : Réponse à la lettre 


Chacun répond au texte d'un autre participant. 


Proposition n°4 : À partir d’une image 


Image différente pour chacun.

Quelques textes du 5e jeudi


À partir d'une annonce "Copains d'hier" 


Armand Legros
Fresnes, cellule 56 

Chère Paulette, chère grand-mère, 

Je suis l'un des jumeaux que vous souhaitez retrouver. C'est moi qui vous écris car je suis l'intellectuel de la famille. De plus je suis au frais pour quelques années, ce qui me laisse le temps de lire les journaux ; c'est ainsi que je suis tombé sur votre annonce dans le magazine Pleine Vie. Mon frère Etienne est en cavale. Je lui parlerai de vous à l'occasion, mais je ne vous promets rien. Il ne peut pas reparaître en région parisienne à cause d'une embrouille avec les frères Torini ; il est également tricard en Corse, dans le Sud du pays, et même, par précaution, dans la France entière. 
Comme vous le voyez, notre histoire a été agitée. Sans vouloir vous vexer, c'est à cause de votre fils Philippe, que j'ai du mal à appeler mon père. Maman l'a rencontré au Franprix du Perreux-sur-Marne où il était gérant et elle vendeuse. Elle est tombée raide amoureuse de lui, et j'ai vu une photo, c'est vrai qu'il était beau. On lui ressemble un peu, mon frère et moi. Mais il était violent, comme vous le savez sans doute. Maman avait peur de lui, mais c'était son patron, elle ne savait pas quoi faire. Et puis, quand elle a compris qu'elle allait se retrouver coincée avec lui et les enfants (je parle de moi et Etienne), elle a décidé de partir sans laisser d'adresse. Elle était enceinte de huit mois. 
Elle a juste eu le temps d'arriver chez son cousin Roger ; elle a accouché sur la table où on imprimait les billets. Il faut vous dire que Roger était faux-monnayeur, et très sympathique au demeurant. Il nous a appris le métier. Après, nous avons fait quelques cambriolages et diverses expériences, jusqu'au casse de la bijouterie "un diamant pour la vie", qui a mal tourné ; vous avez dû en entendre parler aux infos. 
Bref, Etienne est caché, moi je suis au trou, et Maman est bien vivante mais ne tient pas à vous revoir, à cause des mauvais souvenir. Moi, ça ne me dérange pas ; vous pouvez venir me visiter à Fresnes si vous voulez. 

À bientôt peut-être, 

Armand Legros (Vanessa)


Réponse à une lettre reçue suite à l'annonce 


Cher Monsieur Bouscaren, 

Je suis la voisine et amie de Gisèle Dupont, à qui vous avez écrit récemment. Je me permets de vous répondre à sa place car Gisèle a bien changé depuis cinq ans ; elle perd la mémoire et vit de plus en plus dans un monde imaginaire. Elle croit avoir un rôle important dans le gouvernement, bien qu'elle ignore le nom du président ; et elle n'a aucun souvenir de l'annonce qu'elle passée, ni de sa cousine Simone. Elle dit que son mari est John F. Kennedy, et comme elle ne fait de mal à personne je la laisse fabuler et je l'aide à faire ses courses. 
J'ai été émue par le récit de vos recherches familiales, mais malheureusement Gisèle ne pourra pas les compléter. En revanche elle possède des cartons pleins de photos de famille, qui pourraient vous donner de pistes. Pourquoi ne pas venir boire un thé avec nous un dimanche ? Gisèle ne comprendra pas qui vous êtes, mais elle appréciera votre compagnie, et vous pourrez jeter un oeil aux photos.
Bien cordialement, 

Albertine Durand (Vanessa)


À partir d'une image





Olivia aimait Teddy et Teddy aimait Olivia. Ils s'étaient rencontrés à la Foire du Trône un jour de juin 2015, devant un stand de barbe à papa ; ils ont vacillé sous le coup de foudre. Ils étaient encore au lycée, ils ont cru que ça durerait toute la vie. 
Et puis il y a eu les disputes et les incompréhensions, et il y a eu Samantha avec ses gros seins et Kevin le dragueur, et peu à peu l'amour de Teddy et Olivia s'est éteint. 
Ils se sont donné rendez-vous une dernière fois à La Foire du Trône pour se dire adieu. Teddy serre Olivia dans ses bras ; Olivia a envie de pleurer et en même temps elle pense un peu à Kevin. Bientôt il ne restera de son premier amour qu'un sac à dos en forme de grenouille et quarante-sept-mille doubles selfies. 
Vanessa

Mercredi atelier n°5


Proposition n°1 : Cadavre exquis en 4 tours

- Verbe à l’infinitif avec quelque chose en plus
- « c’est » + autre verbe à l’infinitif + quelques mots
- « c’est aussi… »
- « C’est enfin… »


Proposition n°2 : Correspondance épistolaire

Chacun choisit une petite annonce dans la page « Copains d’hier : aidez-les à se retrouver » d’un magazine pour personnes âgées.
À partir des éléments fournis dans l’annonce, on écrit une lettre pour reprendre contact ou donner des nouvelles de la personne recherchée.


Proposition n°3 : À partir d’une image 

Image différente pour chacun.

Quelques textes du 5e mercredi


Cadavre exquis 


Se gratter l'oreille 
c'est courir à tort et à travers 
c'est aussi passer à côté de sa vie 
c'est enfin se moucher avec des bas. 

Voyager sans cesse 
c'est boire une infusion à la camomille 
c'est aussi perdre la vue sans raison 
c'est enfin un plaisir bien féminin. 

Chercher de l'or 
c'est s'assurer la tranquillité 
c'est aussi pleurer comme une madeleine 
c'est enfin boire un petit calva. 

Se moucher bruyamment 
c'est se rouler dans la neige 
c'est aussi s'extasier devant un tableau de Chagall 
c'est enfin lire les nécrologies dans le carnet du Monde.  

Vivre caché 
c'est reculer pour mieux sauter 
c'est aussi péter dans la soie 
c'est enfin plus facile que de se gratter le dos.

Ouvrir le robinet 
c'est un grand soulagement 
c'est aussi rire sous cape 
c'est enfin pleurer de joie. 

Se nouer les cheveux 
c'est réveiller son conjoint 
c'est aussi jouer à la marelle 
c'est enfin s'enrouler dans une couverture en mohair. 

Parler le chinois 
c'est changer de métier 
c'est aussi dépenser sans compter 
c'est enfin parier sur le mauvais cheval. 

Essayer des chaussures neuves 
c'est se regarder le nombril 
c'est aussi une façon de commencer une histoire 
c'est enfin arriver fatigué au boulot. 


Réponse à une annonce "copain d'hier" 



Cher Paul, 

Déjà en écrivant ce "cher Paul" je suis en train de mentir, mais il faut bien commencer. Et puis, comme tu l'écris si joliment dans ton annonce, j'étais ton "ami de jeunesse" et tu étais le mien. Nous étions inséparables, on nous appelait les jumeaux, Montaigne et La Boétie, Castor et Pollux. 
Et oui, cher Paul, nous avons pratiqué bien des activités artistiques et physiques. Je garde un bon souvenir de cette époque à Casablanca, baignée de soleil et de camaraderie ; je n'emploierai pas un autre mot pour épargner ta pudeur. Un bon souvenir, donc, mais aucune nostalgie. 
Car lorsque je t'ai revu en 1972 tu m'as présenté ta femme, fièrement, comme si tu avais réussi je ne sais quel rite de passage, et même, si mes souvenirs sont exacts, trois charmants lardons que vous aviez eus ensemble. J'ai fait bonne figure, je serais moins poli aujourd'hui si je te revoyais. 
Pour ma part ça n'a pas été facile tous les jours, mais je n'ai jamais renié ma nature. Je vis depuis vingt ans avec Albert, mon compagnon que j'ai rencontré à un cours de peinture, et qui, lui, ne m'a pas quitté pour une femme. 
Voilà, je n'ai rien d'autre à te dire. Je vois que tu habites dans un bled appelé "Bonsecours", ça te va bien, ça fleure bon l'eau bénite et les cachotteries. 
Adieu, 

René (Vanessa)


À partir d'une image 





Non mais ça n’est pas vrai ! Non mais je rêve !! Non mais quel con !!! 
Et ça fait quarante ans que ça dure, quarante ans que c’est notre pote, quarante ans que l’on trimballe ce boulet. Déjà en primaire, chaque fois qu’il faisait une connerie, on trinquait tous les quatre. Après il y a eu la colo, loin de sa maman, il fallait consoler Monsieur petit lapin en sucre et qui s’en chargeait ? les trois autres. Je ne te parle pas de la honte qu’il nous a collée lorsqu’il a commencé à draguer. Après, une fois que l’on a réussi à le caser, il fallait convaincre sans cesse sa petite femme de rester avec celui qu’elle appelait son abruti de mari. Je ne te parle pas des dépannages financiers à chaque fois que Monsieur l’incapable se faisait virer comme un malpropre de son entreprise. 
Alors, aujourd’hui, je vous le dis très clairement, si ce crétin ne retrouve pas très vite les clefs du camion et que l’on est obligé de rentrer à pieds, je le tue, je le flingue, je l’explose, je le disperse ici même, éparpillé dans la forêt le Paulo, façon puzzle, comme dirait Tonton. 
Oui Monsieur !!!... 

Pierre