Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Atelier n°6


Proposition n°1 : Acrostiches


- Chacun choisit un objet et l’inscrit verticalement sur sa feuille ; 
- Puis écrit un texte décrivant cet objet, chaque ligne commençant par la lettre du mot choisi.

Thème commun choisi par le groupe: la géographie


Proposition n°2 : L’anecdote


Le jour où j’ai pris un coup de vieux
           Ou :
Le jour où j’ai pris un coup de jeune!


Proposition n°3 : À partir d’une situation


Une femme / un homme descend du train, cherche quelqu’un du regard. Elle/Il attend…

Quelques textes du 6e atelier


Acrostiches


Couronnée de gratte-ciels
Hauts comme des tours de Babel 
Incontournable au centre du pays 
Cette ville belle, violente et musicale 
A le privilège agaçant d'être toujours la deuxième... 
Grande mais pas capitale
On la préfère pourtant grâce à son lac Michigan.
Vanessa


Le jour où j'ai pris un coup de vieux


Je commençais à m'ennuyer, toute seule dans mon grand bureau. Marie-Michèle était partie à la retraite six mois auparavant; elle avait eu droit à un pot de départ mirifique, et puis elle avait quitté la boite, emportant son ficus et ses chatons en rotin. J'avais d'abord apprécié a liberté nouvelle, je mettais de la musique très fort sans gêner personne, je faisais du stretching postural sur la moquette, mais au bout d'une moment on se lasse. Il me manquait quelqu'un à qui parler.
Et puis Kevina est arrivée, et on s'est tout de suite bien entendues. Elle avait 26 ans, moi 47; mais nous aimions les mêmes séries, nous parlions de nos lectures, des garçons de la boite, nous prenions ensemble le petit café de onze heures... Je lui ai montré les dossiers, elle a dû s'y mettre tout de suite car on n'est pas trop de deux à la DRH. Et puis un jour elle a pris le temps de ranger entièrement son meuble de bureau, où Marie-Michèle avait laissé des kilos de documents. Elle en a beaucoup jeté. J'étais occupée sur mon ordinateur quand elle m'a interpelée: "Qu'est-ce que c'est, ça?"
Elle tenait à la main une disquette. J'ai cru qu'elle était ironique, mais son visage exprimait une réelle incompréhension. Purée! Kevina était née dans un cloud. Je me suis rappelé ma découverte de l'informatique pendant mes études. Les premiers mails. La merveille de voir son mémoire magnifié par le traitement de texte. Et oui, pour le transporter de la fac à la maison, le carré de plastique noir sur lequel on collait une étiquette où on écrivait DEA de Lettre Modernes. La disquette.
J'ai donc raconté à Kevina l'aventure de la disquette. Comme une vieille dame raconte aux enfants ce qu'était le MLF quand elle criait des slogans féministes sous les lacrymos des CRS. J'ai raconté mon combat. Telle un coryphée, j'ai chanté la disquette de mon DEA. Puis j'ai ajouté un couplet pour préciser ce qu'était un DEA.
On est toujours le vieux de quelqu'un.

Vanessa