Petite annonce en cadavre exquis
Jeune homme célibataire vend vélocipède sans selle ni roue avec cadre rouillé d'origine pour déco hall d'entrée Hallween.
Lilly notre hamster achète cours de chinoir en vue de pacifier les relations de voisinage.
Jeune femme sérieuse recherche désespérément vieux balai afin de s'épanouir à la campagne.
Troupe de danseurs amateurs souhaite rencontrer son hamster, Hector, compagnon fidèle, pour ballade en raquettes.
Schizophrène espérantiste recherche un nouveau foyer et plus si affinités.
Jeune femme élégante vend bel homme cultivé afin d'apprendre à plonger en apnée.
Évocation d’un personnage
Mademoiselle Hubert est une femme d'âge mûr, grande, mince, élégamment vêtue, qui vit seule au 35 avenue de la Grande Armée. Elle travaille à mi-temps à la bibliothèque municipale. Le soir, elle va souvent boire un verre au bar-tabac Le Bienvenue, où elle joue au 421 avec les habitués.
Elle a une drôle de tête, cette Madame Hubert. Un visage carré, un regard dur, un gros cou; on dirait un travelo.Peut-être qu'elle était un homme, dans le passé; et si ça se trouve, Hubert, c'était son prénom avant l'opération. Ca expliquerait bien des choses. Mon mari lui sourit toujours d'un air crétin quand on la croise dans l'escalier. Il la trouve très classe. Ah, les hommes...
J'aime bien lire des bandes dessinées à la bibliothèque. Le mardi et le jeudi il y a la grande femme blonde avec les yeux bleus, celle qui ressemble à ma mère en plus vieille. Elle me donne des conseils, elle a même commandé des nouvelles BD de science fiction parce que j'avais fini de lire tout le rayon. Elle est cool.
Nous, au Bienvenue, on est une petite bande qui se retrouve le soir pour jouer au 421. On est que des hommes, sauf Mademoiselle Hubert; mais elle s'en laisse pas conter. Personne n'a jamais réussi à se faire inviter chez elle; c'est pas faute d'avoir essayé, pourtant. Et elle tient bien l'alcool. Une fois, elle m'a aidé à ramener le Patrick chez lui, quand il tenait plus debout.
Je n'ai pas eu de chance, dans cet immeuble. Personne ne m'a ouvert la porte, sauf cette femme toute sèche au cinquième; et quand je lui ai demandé si elle avait rencontré Jésus-Christ elle ne m'a pas laissé finir. J'ai l'habitude des rebuffades, bien sûr, ça fait partie de mon sacerdoce. Mais cette femme, je ne sais pas comment elle a fait, elle n'a pas été impolie ni agressive, mais en une minute je me suis retrouvé derrière sa porte close. J'aurais bien aimé la sauver.
Mademoiselle Hubert, je ne sais pas à quoi elle ressemble physiquement, mais j'ai l'impression de la connaître. Elle m'écrit toutes les semaines. Ca m'aide à tenir le coup. Sans elle, je me serais tué. Elle doit avoir quelque chose dans son passé pour me comprendre aussi bien. Peut-être qu'elle a fait de la taule, elle aussi.
Vanessa
*
Objectif :
Sam, sdf, souriant, aimant parler, les gadgets électroniques et l’ivresse.
Assistante croix rouge :
Ce Sam ! ha, je l’ai vu hier, sous le pont de Bercy, il cuisait son cassoulet sous le réchaud collectif de sa bande aux canapés ! Il fixait la flamme de son gaz et n’a même pas calculé !
Opticien du coin :
Sam, je le croisais tous les jours, il passait devant mon bureau pour aller au café… ah ça faut dire qu’à dix heures, il était déjà fait !
Un éboueur :
Une fois, il m’a interpelé. Qui ? Ben Sam, le sdf du quartier ! Je lui ai offert une cigarette puis il m’a causé, les flics sont sympas il dit mais dans ses congénères certains l’ont tabassés.
Un policier :
Sam ?! Le sdf connecté ! Faut dire que rien ne marchait, mais il avait toujours tout plein de gadget électroniques sur lui. Du Talkie au GSM en passant par son canon automatique, avec sa tête d’asiatique, il concurrençait Mongallet dans le quartier !
Un homme pressé :
Il passait devant le bureau « elle est là » en désignant ma collègue, « toi là » en me pointant du doigt, « moi là » en restant devant la porte vitrée avant de nous saluer respectueusement à la japonaise et de nous lancer son « bonne journée les gars » !
Une gardienne d’immeuble :
Sam ?! Quand je suis arrivé il y a 5 ans, j’ai tout de suite sympathisé. Gentil, aimable, poli, effacé quand il fallait. Il disait bonjour et c’est nous qui allions vers lui. Il devait être reloger, la mairie lui avait trouvé un toit… Il a dû trop le fêter, il nous a quitté juste avant ça… ah Sam, je vais le regretter !
La cafetière :
Il passait tous les matins, à l’heure où les gens prennent le café… ah ben il avait une petite ardoise ici mais s’en acquittait… il aimait parier, ah ça il aimait parier… et le tiercé m’a bien remboursé !
La boulangère :
Une fois je l’ai retrouvé au matin devant l’entrée, débraillé et lourd comme un mort, à peine s’il pouvait me regarder… avec un seau d’eau que je l’ai réveillé ! Non mais vous comprenez des gens comme ça je veux bien mais plus loin, ça tue les petits commerces ! Oui, oui celui avec le talkie. Sam vous dites ? ah oui peut-être… un dix pour la baguette.
Loïc
Albert Sanchez était, au dire de ses voisins, un homme sympathique. Petit et rondelet, il déambulait dans la vie tel un bidibule exalté. Ses petits yeux noirs pétillants semblaient à chaque instant découvrir le monde avec une curiosité amusée. Sa chevelure avaient depuis longtemps délaissé son crâne et pourtant Albert Sanchez n'avait pas encore atteint la barrière symbolique des 40 ans ans, du moins, c'est ce que déclarait sa mère à qui voulait bien l'écouter, c'est à dire presque personne. Albert Sanchez avait été marié mais il considérait cette période de sa vie comme une malencontreuse erreur. Son ex-femme était tout à fait d'accord. C'était bien le seul point qui les rassemblait. Albert Sanchez avait un seul regret. Il aurait voulu devenir une star du rock mais la place était déjà prise, du moins c'est ce que son ami Raoul ne cessait de lui répéter.
Ses voisins : C'est un homme sympathique et sans histoire. C'est tout ce qu'on peut dire. Nous ne voulons pas de problèmes avec sa mère.
Sa mère : Je sais que toutes les mères disent la même chose mais dans mon cas, c'est particulièrement vrai. Mon fils est extraordinaire. Il a un charme fou. La raison pour laquelle il n'est pas marié, c'est qu'il ne sait pas qui choisir entre toutes ces femmes qui sont folles de lui. Il est craquant, mon petit bout de chou. Pour moi ce sera toujours mon fils. C'est moi qui lui fais sa lessive et qui lui repasse son linge. Je suis sa mère. C'est normal. Et je suis si contente qu'il vive chez moi. Je suis veuve, vous comprenez. C'est important d'avoir une présence à la maison.
Son ex-femme : J'étais bien jeune et bien stupide. C'est la seule raison qui m'ait poussé à épouser ce nul. Ce n'était certainement pas l'attirance physique. Il est bien gentil mais avec son physique de crapaud, vous imaginez la tête qu'aurait eu notre enfant ! Et puis, moi, franchement, vivre avec sa mère, je ne l'ai pas supporté longtemps. Je suis certaine que le KGB avait des méthodes d'inquisition plus subtiles qu'elle. Albert est tel qu'il apparaît: c'est un gros bébé. Moi, je cherchais un mari, pas un enfant.
Son ami Raoul : Albert me fait rire. Il n'y en à pas deux comme lui. Sa dégaine est unique... Dieu merci ! J'ai un peu pitié de lui. C'est aussi pour ça que je le fréquente. Toujours sans emploi à 45 ans ! Je pense que c'est dû à son manque de maturité (merci maman !) et au fait qu'il se soit mis en tête de devenir star du rock. Vous imaginez le bibendum Michelin en concert ? Il ne se rend pas compte... C'est mon rôle de lui mettre les yeux en face des trous. Et simplet comme il est, je dois le lui rappeler tous les jours. Je lui dis que Johnny a déjà le poste. Il me croit, cette andouille. Il me fait rire, le pauvre.
Albert : C'est fou la vie. J'ai un talent dingue (et ça, ma mère me le dit tous les jours) mais je dois rester les bras croisés parce que Johnny Halliday reste à son poste alors qu'il a passé l'âge de la retraite. J'essaie de faire comprendre à Raoul que c'est injuste mais il ne comprend pas. Il n'est pas bien fin, Raoul, mais je l'aime bien. Je l'ai rencontré à un stage au Pôle emploi. Je ne me rappelle plus du stage . Je crois que c'était même lui qui animait la formation. Ah oui, c'était un stage sur l'image de soi. Je n'ai rien compris au stage mais je suis resté ami avec Raoul. Il me fait rire.
Dialogue entre deux personnages
Dialogue entre Inge von Strödel, célèbre actrice et le jeune Mark Spencer-Jones .
L'occasion : l'anniversaire de l'actrice qui fête ses 80 ans.
- Miss von Strödel, je suis honoré de faire votre connaissance. Je vous admire beaucoup.
- Oui, mon petit, comment pourrait-il en être autrement ? Je suis une star, après tout. Mais est-ce votre admiration pour moi ou votre intérêt personnel qui vous amène à me faire ce compliment néanmoins parfaitement mérité ?
- Ne vous méprenez pas sur mes intentions. J'ai certes de l'ambition mais j'ai aussi du savoir-vivre. En l'occurrence, je suis sincère dans mes propos.
- La sincérité ne vous mènera pas bien loin dans cette industrie impitoyablement hypocrite qu'est le monde merveilleux du cinéma. J'en ai vu défiler des petits mignons qui se voulaient sincères. Ils ne sont pas arrivés bien loin en tant qu'acteurs. En revanche, ils ont tous fait de superbes carrières en politique.
- La politique, ce n'est pas ma tasse de thé.
- Détrompez-vous jeune homme. La politique, c'est notre tasse de thé quotidienne et il faut savoir la boire avec intelligence, faute de quoi on se noie dedans.
- J'aime beaucoup vos aphorismes, madame von Strödel. Ils sont profonds.
- Pas aussi profonds que la tasse de thé dans laquelle vous êtes en train de vous noyer. Mais passons. Quoi qu'il en soit, je tenais à vous dire combien je vous admire.
- L'admiration, c'est ce qui remplace souvent le désir : on le réserve aux actrices vieillissantes... ou laides. Cela tient plus de l'offense que du compliment.
- Quel cynisme ! J'imagine que vous ne croyez plus à rien.
- Mais bien au contraire, jeune homme. Plus je vieillis et plus je crois. Je crois que les relations sont toujours intéressées, je crois que la vieillesse suscite toujours une forme de pitié, je crois que le succès attire l'envie et je crois que les jeunes loups comme vous sont toujours prêts à faire croire aux femmes qu'elles sont désirables ou merveilleuses dans le seul but de promouvoir leur propre carrière. Et enfin, je crois qu'il est temps pour vous d'aller parler à d'autres personnes.
- Avant de partir, je "crois" qu'il est temps pour moi de vous dire qui je suis. Je suis votre petit fils, le fils de votre fille Anna, celle que vous avez délaissée pour promouvoir votre carrière, une carrière qui se termine pathétiquement avec cette fête d'anniversaire où ne sont venus que quelques acteurs dépassés et séniles. Mais je suis sincère. Je vous admire. J'admire votre égoïsme, votre insensibilité, votre volonté de fer. Je vous admire mais je ne vous envie pas ! Bon anniversaire et au revoir, grand-mère !
Pascal
Salut toi ! Tu sais que t’es beau, tu sais que t’es BEAU !... attends, attends pousse le béret en arrière, boutonne le bouton… hé hé beau comme un camion de quinze tonnes ! Bon cache tes dents quand tu souris sinon elle verra qu’elles ont pourries, enlève la bague, t’es célibataire mon gars… on t’as prévenu la Mercier elle aime consommer, alors pour ce contrat si il faut y passer, t’es prêt !
Toc toc !
« Entrez. »
« Bonjour madame Mercier, je… »
« Oui, oui je sais, installez vous je finis mon entretien avec… mais installez vous. Vous voulez un café ? »
« Je… »
« Mélanie, deux cafés s’il vous plait.
Oui Thierry, mon chinois est arrivé… hmm… chais pas, on verra c’est pas gagné… bon écoute je vois ça et je te rappelle, oui moi aussi, oui très fort, oui… hihihi, t’es coquin… je te rejoins à midi, allez.
Monsieur Wang je suppose ? Je parlais avec votre concurrent pour l’export de denrée, il va falloir vous accrocher… vous voulez ce marché n’est-ce pas monsieur Wuang ? »
« hmm… bonjour madame Mercier je suis Brice Bonvoisin pour la présentation du buffet de vos convives jeudi en huit… »
« haaa… »
« Oui »
« Je vois »
« Oui ? »
« Oui. »
« Bien »
« Non en fait »
« Ha ? »
« Et oui ! »
« Le buffet, jeudi, vos invités… »
« Vaguement… »
« Le buffet d’orient autant qu’en emporte gros vent, recommandé par Bocuse et les 3 gros »
« Ah oui j’y suis, en parlant de gros… »
« C’est que j’aime gouter mes plats… »
« Ça se voit… vous devriez vous reconvertir à mi-temps… »
« Madame ma devise est celle de Caradoc : le gras c’est la vie ! »
« Caradoc ? »
« Oui, le preux chevalier qui dépose sur la tenture derrière vous gibiers et victuailles aux pieds de sa bien aimée »
« Gibiers et victuailles ? Sa bien aimée ? Sachez monsieur qu’il s’agit d’une tête que cet homme dépose aux pieds sacrés de son impératrice. La tête de son ex-amant infidèle et écervelé. »
« C’est à s’y méprendre madame avec notre mythe de Caradoc, l’incarnation de Bacchus dans notre civilisation orientale… La même tenture traits pour traits… je l’aime beaucoup, vous avez beaucoup de goût ! »
« Oui, vous trouvez ? »
« Ah oui, si votre esprit s’inspire de telle beauté vous devez sans conteste être la plus majestueuse du palais de l’Elysée »
« Oui ?... »
« Oui !... »
« Mélanie ? Monsieur est retenu, veuillez lui montrer les salles et régler les détails financiers.
Monsieur, enchantée… »
Loïc