Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Quelques textes du 8e atelier


Définitions de mots inventés


SPIGUEZOU
n. m. Instrument de musique inventé par les Zazous, qui émet des sons grâce au frottement d’un archet sur les lacets de chaussures.

VRAPOUF
n. m. Gigantesque coussin gonflable destiné à réceptionner les pratiquants de varappe en cas de chute.

TULCRO
n. m. Carré de tulle qui, grâce à un système de fixation sur le cuir chevelu, permet aux futures mariées chauves de se présenter devant l’autel avec un voile sur la tête.
Pierre 


GLOURADIER
v. t. Préférer se reposer au lieu d’effectuer les tâches assignées par son supérieur. 

TRIBLOSIEN
n. m. Habitant de la Triblosie, pays réputé pour la fabrication des bloches à dents à trois pieds. 

Hélène


SPIGUEZOU
Nom masc. Outil multifonctions utilisé sur les chantiers au Moyen-Age. 
Ex: "La porte est bloquée. Sors le spiguezou."

VRAPOUF
Onomatopée. Voc. culinaire.
Bruit du soufflé qui retombe, du moelleux démoulé trop tôt, ou de tout autre réalisation culnaire qui s'é case lamentablement en sortant du four.
Cit : "Et voilà la dessert ! Vrapouf. Oh non !" (Spirou).
Vanessa

L'écriture du cliché


Les premiers rayons du soleil brillaient en ce doux matin de printemps. Anastasia avait décidé de prendre son petit déjeuner sur la terrasse afin de profiter du chant des oiseaux et de la délicate odeur de jasmin qui flottait dans l’air. Elle savourait son café les yeux mi-clos, confortablement installée dans un agréable fauteuil en osier, et exposait son corps courtement vêtu mais fraîchement parfumé à la douce lumière du soleil. Elle regrettait, une fois de plus, que son mari soit parti au petit matin et ne profite pas avec elle de ce moment de bonheur intense.
Son mari était le puissant avocat d’affaires, Vladimir Sakarov, immensément riche et respecté en raison de ses liens étroits avec les plus influents patrons d’entreprises d’import-export du pays. Il passait le plus clair de son temps dans son bureau ou encore au restaurant, où il appréciait de négocier d’importants contrats. Il quittait le domicile conjugal très tôt le matin et rentrait tard le soir, et retrouvait le plus souvent Anastasia endormie sur le canapé en cuir du salon, alors que l’écran panoramique retransmettait un quelconque soap opéra brésilien.
Anastasia souffrait de plus en plus de cette situation et de sa solitude. Vladimir considérait qu’il gagnait suffisamment d’argent pour deux et l’avait incitée à ne pas travailler. Elle passait donc la plupart de ses journées seule dans leur grande propriété, que pléthore de domestiques, femmes de chambre et jardiniers s’employaient à entretenir et à embellir. Elle s’y ennuyait et ce jour ne fit pas exception. Après son bain de soleil, Anastasia décida d’appeler Natacha, la femme d’un ami proche de Vladimir, afin de partager avec elle ses sentiments et lui demander conseil.
— Mais prends donc des cours de golf ma chérie ! Je connais un professeur extrêmement compétent, Igor Strovasky. Appelle-le de ma part, tu verras, tu ne seras pas déçue… Ça te changera les idées, crois-moi sur parole !
Anastasia n’avait jamais joué au golf — elle avait toujours préféré l’équitation — mais était tellement décidée à rompre la monotonie de son existence qu’elle finit par appeler Igor Strovasky.
Quand il décrocha son téléphone, Anastasia fut immédiatement troublée par la voix grave et sensuelle d’Igor, qui lui proposa de venir dès le lendemain. Les premières leçons pourraient avoir lieu dans l’immense parc de la propriété des Sakarov.

L’amour sera-t-il au rendez-vous ? Emportera-t-il tout sur son passage ? Vous le saurez en lisant le prochain chapitre de notre roman-feuilleton, « À la recherche de l’amour perdu », de Marceline Broust.

Hélène 

*****

Hortense resta quelques instants immobile sur le trottoir d'en face, contemplant avec une terreur mêlée d'admiration l'imposant bâtiment de verre et d'acier. Aurait-elle le courage de pénétrer dans la première entreprise de la région, la Bates Incorporated Company, pour passer un entretien d'embauche ? Elle, l'orpheline modeste et courageuse, qui avait mené de front ses études de marketing et son travail de caissière, et qui avait englouti ses maigres économies dans un tailleur gris perle, un chemisier blanc et des escarpins afin de donner le change ?
Elle se sentait toute petite devant ce grand bâtiment où s'affichaient le nom Bates Inc. en lettres capitales. Prenant son courage à deux mains, Hortense commença à traverser la rue. Soudain, comme elle eut un instant d'inattention alors qu'elle ajustait la bandoulière de son petit sac à mains, elle se sentit partir. Un bruit assourdissant, un choc à la tête ; elle était tombée, renversée par une énorme berline noire qui freina à deux centimètres de sa tête.
Étourdie, Hortense ferma les yeux. Puis elle se sentit soulevée et secouée durement. Une voix mâle demandait instamment :
— Ça va Mademoiselle ? Vous m'entendez ?
La même voix, ferme et un peu rauque, donnait des ordres :
— John, portez-là dans la voiture et allons à l'hôpital, vite ! Hortense essaya de résister, marmonnant : — Mais non, je ne peux pas, je dois...
Mais déjà on la déposait sur le siège capitonné d'une luxueuse voiture, qui s'élança à toute vitesse. À côté d'elle, un homme grand, brun, vêtu d'un impeccable costume italien sur mesure, la regardait avec inquiétude. Quand elle ouvrit ses yeux bleu azur, il eut un sourire qui éclaira d'une flamme nouvelle son visage sévère.
— Vous m'avez fait peur. J'ai cru que mon chauffeur vous avait tuée..
Hortense se redressa sur son siège. Sa main frôla celle de l'inconnu, et elle sentit son coeur s'emballer. C'était un sentiment inconnu. Soudain elle s'écria :
— Il faut que je descende ! Je dois passer un entretien d'embauche à 16h.
— Un entretien ? ou ça ?
— À la Bates Incorporated Company. Je n'ai pas besoin d'aller à l'hôpital, je vais bien. L'homme avait une étrange expression sur son visage viril.
— La Bates Incorporated Company ? Ne vous affolez pas. Je vais vous arranger ça.
— Mais vous ne comprenez pas ! J'ai absolument besoin de ce travail. Oh non ! Ma jupe ! s'écria-t-elle, en voyant l'horrible déchirure sur sa cuisse. C'est fichu !
L'homme sortit d'un étui en cuir de crocodile une carte de visite :
Peter F. Bird 
CEO 
Bates Incorporated Company 
Hortense ouvrit de grands yeux...

Vanessa


Écrire sans réfléchir


compas, téléphone, calculette, président, magazine, foulard



Ah, c’est malin pour un marin, de se retrouver chez l’opticien avec un compas dans l’œil !!! Le praticien, quelque peu affolé devant l’état de Jérôme attrapa le téléphone pour appeler son ami ophtalmo. Celui-ci, furieux, lui hurla qu’il n’était point besoin d’une calculette pour savoir qu’il fallait envoyer son patient à l’hôpital de toute urgence et qu’à l’élection des incompétents il serait élu président à l’unanimité. Grosse colère quelque peu justifiée contre notre opticien lamentable qui ne semblait se préoccuper que des magazines tachés par le sang de Jérôme dans la salle d’attente. Voulant se débarrasser au plus vite de l’intrus, il lui colla une compresse sur l’œil qu’il fit tenir en lui nouant un foulard autour de la tête et il appela un taxi. 
Pierre



Shivarik posa le crâne à côté du compas et des tubes à essai. Il avait besoin de tous ses outils et objets de méditation s'il voulait inventer le téléphone avant le coucher du soleil. Il avait déjà perfectionné le minitel et la calculette ; mais il manquait à son palmarès une invention vraiment originale et universelle. Il fallait bien cela s'il voulait recevoir la légion d'honneur des mains du Président. Grâce à sa future invention, son nom serait de tous les magazines, accompagné de sa photo en couleur. Comme le crâne le déconcentrait au lieu de l'aider, Shivarik le recouvrit d'un foulard ; puis il se remit au travail.
Vanessa



À la barre, Peter calculait la direction à prendre à l’aide de sa carte et de son compas. Il avait décidé d’emmener Barbara en croisière mais sans aucun instrument moderne de navigation : ni GPS, ni téléphone. Barbara avait trouvé l’idée séduisante au départ, mais au bout de deux semaines sans ordinateur, ni même la moindre calculette, elle commençait à trouver le temps long. Quelques semaines plus tôt, elle avait succombé au charme de Peter, président de la Gold Chain Company, et qui n’hésitait pas à soulever des montagnes pour elle. Cependant, elle commençait à regretter son choix. Heureusement, elle avait emporté quelques magazines de modes qui lui permettraient de patienter jusqu’à la prochaine escale. Elle avait justement repéré un magnifique foulard Hermès que Peter pourrait lui offrir lorsqu’ils arriveraient à St Bart. Finalement, cette croisière serait peut-être plus amusante que prévu ! 
Hélène