Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Quelques textes du 2e atelier



Quatrième de couverture

Jeté de safran sur noix de saint-jacques, par Odilon de la Jardinière

Dans ce texte hybride, à mi-chemin entre autobiographie et recette de cuisine, Odilon de la Jardinière nous entraîne dans un voyage culinaire ébouriffant. Il nous fait explorer les mill et une saveurs de la vie, de la tendre tarte aux pommes caramélisées que lui préparait sa grand-mère, aux arides plats sous vide lors de ses séjours à l'hôpital, en passant par d'étonnantes inventions personnelles lorsqu'il tente de séduire un fille en l'invitant à dîner. Sa recette du mouton au chocolat, réalisée dans une marmite au-dessus de la flamme du soldat inconnu, est un moment réjouissant de spontanéité. Le passage en prison qui suit cette aventure ne manque pas de sel non plus. Bref, ce livre est un régal à mettre entre toutes les mains.

A propos de l'auteur: Odilon de la Jardinière a 47 ans. Il est l'auteur de Tremblements de terre et coulis de tomates, qui a reçu le prix 2008 du meilleur récit d'aventures culinaires, et du très émouvant Mon Coeur est un nougat à la pistache.
Vanessa

Première phrase imposée

Il marchait seul dans la rue quand il entendit : « Salut, tu me reconnais ? ».

C’était un jeune homme blond, au cheveu raide, vêtu d’un blouson de nylon noir serré à la taille et d’un jean de même couleur.

Il le regarda, sans doute d’un air étonné puis gêné. La gêne c’était ce qu’il éprouvait depuis dix jours. Il aurait dû s’y préparer car, à présent, il n’arrivait pas à s’y habituer.

Cela faisait dix jours qu’il était là.

A nouveau là.

A nouveau dans son appartement dans lequel il était revenu dormir.

A nouveau dans les rues qu’il arpentait du matin au soir pour retrouver cette vie qui l’avait quitté.

A nouveau dans les parcs dans lesquels il s’asseyait pour observer.

A nouveau dans les boutiques pour voir le regard des vendeurs se poser sur lui et sentir qu’il existait.

A nouveau là.

Ce jeune homme blond ? Non, non, non, il ne le reconnaissait pas.

Sa mémoire s’arrêtait à trois mois. Fallait-il le lui dire ?

Cette folie soudaine. Elle n’avait jamais été sa folie.

Le bruit du verre qui se brise. Puis cette chambre silencieuse aux murs blancs. Un cri parfois venu d’où il ne savait. Et ces médecins et infirmiers qui rentraient chaque jour, à heure fixe, pour la même chose. Et ces personnes en visite qui ne cessaient de lui parler mais auxquelles il ne pouvait répondre.
Ce jeune homme blond ? Non, non, non, il ne le reconnaissait pas. Et il ne le reconnaîtrait jamais.

Fallait-il le lui expliquer ? Lui expliquer que depuis son retour, il y a dix jours, il cherchait son ancienne mémoire, celle d’avant, qu’il persévérait mais que selon les médecins elle était perdue à jamais.

Oui, il devait lui avouer son oubli. Cela l’aiderait peut-être.

Il revint à lui, baissa les yeux. Le jeune homme blond avait disparu.
Sabine