Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Quelques textes du 1er atelier


Style factuel / style hyperbolique

1) Comme tous les matins, je suis partie à mon bureau. A la porte de l’immeuble, la gardienne Madame Limagne discutait avec sa collègue de l’immeuble voisin. Il commençait à pleuvoir. Le clochard de la rue était allongé par terre, son sac à dos posé à côté de lui. J’ai entendu Madame Limagne dire à sa collègue qu’il la gênait pour laver le trottoir devant l’immeuble.

2) Comme tous les matins, je suis partie à mon bureau. J’ai fait grincer la porte de l’immeuble et j’ai vu la gardienne Madame Limagne qui discutait avec sa collègue de l’immeuble voisin. Elles regardaient leurs montres à tour de rôle, l’air inquiet. Il pleuvait à grosses gouttes. L’eau ruisselait dans leurs cheveux mais elles semblaient ne pas s’en soucier. Le clochard de la rue était allongé par terre, face contre terre, les bras en croix comme s’il était tombé brusquement. Ses vêtements étaient trempés, le contenu de son sac à dos s’était répandu sur le trottoir. J’ai senti une goutte froide descendre le long de mon visage. Madame Limagne m’a dit qu’il semblait mort et qu’elles attendaient les pompiers.
Sabine


1) Mon chat s'est levé plusieurs fois cette nuit pour manger des croquettes. J'ai entendu le bruit de ses pattes sur le parquet et celui des croquettes dans le bol, alors que je dormais à moitié.

2) Cette nuit, je dormais paisiblement dans mon lit douillet, quand mon rêve paisible et coloré se nimba d'une atmosphère inquiétante. Un bruit léger mais lourd de menace me faisant pressentir un danger imminent. Je tressaillis et m'éveillai. Rien, le silence. Je me rendormis. Alors le bruit recommença. Je m'éveillai en sueur. A la troisième fois seulement, je compris la provenance de ce bruit atroce; c'était mon chat, qui, tel un tigre assoiffé de sang, se gavait de croquettes.
Vanessa


Ecriture à partir d'une image

Ils sont combien ces hommes ?
4+1=5, mais quand on est petit, ça fait un demi.
Ils sont 4 et demi, ces hommes, avec le petit, à regarder sur le port, les jambes qui dansent au muret, d’autres vies passer au loin. Des vies rêvées, certaines, comme celle du capitaine, et d’autres pas. Des bateaux qu’on montre du doigt.
Et le petit qui partira un jour. Il le sait. Déjà.

C’est par où qu’il va partir ? S’accrochera à un rafiot, à une baleine et viendra s’échouer de sable, sur une côte hostile. A moins qu’il ne soit ce Capitaine.

C’est par où la mer ? C’est devant toi, loin devant, à la tombée de la nuit. On ne voit presque plus rien mais on devine. Les allées venues de la marée qui se déchausse à nos pieds.

C’est par où la répétition ? C’est sous tes pieds, le sable qui se dérobe. C’est dans ton cœur, l’arme automatique de la vie, ses heures, ses saisons.

C’est par où la misère ? C’est par là, à gauche, à droite et à toutes les portes auxquelles tu frappes comme à un tombeau. Tout le monde te regarde.

Et la guerre, c’est par où la guerre ? Le corps en avant, c’est rester vivant. C’est lutter contre l’ennui, tu sais, quand on ne sent plus rien. C’est être loin mais dedans. C’est mourir en exil, mais dedans, avec peut-être un chat pour veiller sur soi.
Elizabeth

« Il est midi. Je meurs de faim. Je suis debout depuis huit heures et jamais mon bâton ne m’a paru aussi utile. Sous mon poids il va d’ailleurs finir par s’enfoncer dans la terre et je vais m’étaler de tout mon long sur la route. Georges va crier et exiger que l’on fasse une nouvelle prise. Ce ne sera que la vingtième ! Le soleil m’éblouit. Je m’ennuis à mourir. Je pense à Marie. Si elle me voyait dans cet accoutrement de berger dandy, perdu dans les Pyrénées au milieu d’un troupeau de moutons ressemblant à des caniches de luxe et regardant passer la dernière Renault, elle s’affolerait. La voiture ne cesse d’avancer, de s’arrêter pour laisser passer les caniches, de reculer, de recommencer. Georges crie dès qu’un mouton s’écarte du droit chemin et demande que l’on recommence la scène. C’est la même chose quand la voiture cale, que le bruit du moteur couvre les cris des animaux, que mon chien aboie quand on ne le lui a pas demandé ou qu’un nuage cache le soleil. N’en parlons pas du nuage qui cache le soleil…Et Frédéric que fait-il ? J’espère qu’il aura pensé à me rapporter mon ordinateur. Peut-être aurais-je dû lui dire que les photos se trouvaient dans deux fichiers. Où que je regarde je ne cesse de voir des tâches blanches sur des collines vertes. J’ai chaud. Vivement la pause-déjeuner. Mais à l’idée de recommencer la même scène cette après-midi, je meurs d’épuisement. Et je suis sûr que ce soir, seul dans ma chambre d’hôtel, j’entendrai encore le bêlement des caniches. »
Sabine