Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Quelques textes du 4e atelier


Ma liste au Père Noël 

Père Noël, pour le 25 décembre pourrais-tu m’offrir, parce que je suis ambitieux,
1. Un passeport suisse avec la nationalité qui va avec,
2. Un grand appartement au bord du lac Léman ?
Sinon, parce que je suis paresseux,
3. Un assortiment de jolies chemises qui ne se repassent pas,
4. Une dizaine de costumes Marks & Spencer qui se lavent en machine ?
Sinon, parce que je suis gourmand
5. Des chocolats ?
Et si rien de tout ça n’est possible, alors, Père Noël, fais moi plaisir et change de travail !
Pascal 

Je voudrais :
 - Un sac magique où on peut rentrer toutes sortes de choses, et qui reste petit et léger, comme dans Mary Poppins ;
- un stylo qui corrige les fautes automatiquement, comme dans Harry Potter ;
- un badge qui me permette d'entrer dans les salons VIP en boîte et à l'aéroport ;
- des lunettes de soleil et une robe de star pour aller avec mon badge VIP ;
- une voiture décapotable et son chauffeur pour accompagner le tout ; 
- un rouleau de réglisse.
Vanessa 


Logorallye

portefeuille ; pingouin ; galère ; crayon ; clepsydre ; sapin ; pétunia.

- Excusez-moi, monsieur, vous avez fait tomber votre portefeuille.
L’homme se retourna, l’air surpris d’avoir été interpellé. Son nez pointu, son smoking, sa chemise à jabot et son nœud papillon lui donnait l’allure d’un pingouin du genre aristocrate fin de race en route pour un dîner de réveillon de Noël. 
- Un grand merci, l’ami. Sans vous je me serais retrouvé dans une sacrée galère sans mon argent et mes cartes de crédit. C’est rare les gens honnêtes par ici. J’ai de la chance d’être tombé sur vous. Je n’ai guère de temps tout de suite mais donnez-moi votre carte de visite et je vous recontacte afin de vous remercier comme il se doit.
Je n’avais pas de carte sur moi. Je donc pris un crayon qui traînait au fond d’une de mes poches et griffonnai mon numéro de téléphone sur un bout de papier que je remis aussitôt à l’homme. 
Quelques semaines passèrent et j’avais complètement oublié l’incident quand je reçus un appel. 
- Vous souvenez-vous de moi ? Vous aviez eu la délicatesse et l’honnêteté de me rendre mon portefeuille que j’avais laissé tomber par terre. Je propose que nous nous rencontrions afin de faire plus ample connaissance. 
Nous primes rendez-vous et nous retrouvâmes dans le superbe bar d’un palace. L’homme semblait heureux de me retrouver. Sa reconnaissance sincère était surprenante et j’acceptai volontiers le cadeau qu’il me fit, cadeau que je ne devais ouvrir qu’une fois rentré chez moi. Ce n’est donc que deux heures plus tard que je pus ouvrir le paquet pour découvrir une clepsydre en or de chez Hermes et un petit sapin de cristal Lalique. 
Ma femme Petunia m’incita à aller faire expertiser ces objets. Il s’avéra qu’ils étaient de grande valeur. Je les mis donc aux enchères quelques mois plus tard et eus la fort agréable surprise de tirer de la vente une somme suffisante pour me payer un grand appartement avec terrasse, en Suisse, sur les bords du Lac Léman. Ma liste au père Noël n’avait donc pas été en vain.. Bien que je dusse encore repasser mes chemises et porter mes costumes au pressing... 
Pascal 


Sous le regard sévère du gorille, Charles-Henri ouvrit son portefeuille et en sortit le carton d'invitation. L'homme en noir inclina la tête et recula d'un centimètre pour lui laisser symboliquement le passage. Un domestique emporta son pardessus, et il pénétra enfin dans le saint des saints, le salon de Madame Céleste. 
- Charles-Henri ! cria la maîtresse de maison en s'avançant vers lui. You made it ! Comme c'est charmant. 
Il se sentit rougir. Dans son costume de location il avait l'impression d'être déguisé en pingouin. "Qu'est-ce que je suis venu faire dans cette galère ?" songea-t-il, dépité. Pour se donner une contenance il prit une coupe de champagne sur un plateau qui passait, tenu sur une main par un serveur droit comme un crayon. L'alcool le détendit, mais ne l'aida pas à trouver ses mots. "Enchanté", disait-il à chaque personne qu'on lui présentait ; et parfois "ah oui, très intéressant" si'l lui semblait qu'un commentaire était attendu. 
Il aurait aimé partir, mais il n'était là que depuis une heure. On ne l'inviterait plus si'l ne faisait pas un effort. Il regarda l'horloge sur le mur : 21h12. Quatre heures plus tard, quand il regarda de nouveau, il était 21h13. Le temps semblait horriblement ralenti, comme une clepsydre asséchée. 
En désespoir de cause, Charles-Henri s'approcha du sapin qui décorait le fond de la pièce, et fit mine de s'intéresser aux ornements suspendus aux branches. "Ça devient pathétique", songea-t-il. "Bientôt je vais compter les boules. On ne m'invitera plus jamais, c'est sûr. Et au fond, je me demande pourquoi je tiens tellement à voir du monde. Je ne parle à personne, personne ne me parle..." 
C'est alors qu'une jeune femme auréolée de Shalimar s'approcha de lui. 
- Bonjour, doit-elle. Je m'appelle Pétunia. 
- Enchanté, dit Charles-Henri. 
Et il rougit. 
Vanessa


Journal de bord d’un voyage imaginaire 

Voyage au centre de l’univers 

Le 18 décembre 

9h30. 
J’aurais dû acheter des chemises qui ne se repassent pas. Je perds du temps à faire les plis. Heureusement j’ai mon costume Marks & Spencer que j’ai lavé à la machine et qui ne se froisse pas au lavage. Je dois rencontrer les autres membres de l’expédition au bord du lac Léman dans une heure. C’est un grand jour pour nous tous. Nous partons en expédition vers le centre de l’univers. 

10h25 Je suis sur les bords du lac Léman et j’attends les autres qui vont surement arriver pile à l’heure à 10h30. Ils sont suisses. 

10h35 
Personne n’est là et je me demande ce qui se passe. J’espère ne pas m’être trompé de date, d’heure ou de lieu. D’un autre côté, dans l’absolu, je pourrais partir en expédition seul. 

11h00 
Toujours personne. C’est agaçant. Moi, je suis extrêmement ponctuel. Sans doute trop : mes amis me reprochent souvent mon manque de souplesse dans ce domaine. Peut-être est-ce l’occasion aujourd’hui d’apprendre une leçon. Il est vrai que l’heure de départ de l’expédition n’a guère d’importance. Il n’y a pas d’urgence. Le tout, c’est de finir par partir. 

11h13 
Franchement, je trouve l’attente exaspérante. Certes, je pourrais partir sans mes camarades mais je me suis engagé envers eux. Que penseront-ils de moi si je pars tout seul ? D’un autre côté, qu’est-ce que ça peut bien faire ce qu’ils pensent de moi ? Ça ne change pas fondamentalement qui je suis. Si tant est que je sache qui je suis… 

12h00 
J’ai bien réfléchi et je me dis que j’ai trop tendance à me conformer à la décision des autres pour leur faire plaisir et ce, souvent, à mon détriment. Je suis un suiveur. Il faut que ça cesse. Je vais prendre ma vie en main et je vais prendre mes propres décisions. 

12h10 
Je vais me mettre en route mais j’ai tout de même des remords. Je fais le pied de grue depuis près de deux heures mais j’ai mauvaise conscience à partir sans me soucier des autres. 

13h00 
Je pars. C’est décidé. Je ne sais pas trop où je vais. C’est une expédition périlleuse mais je veux tenter l’expérience. 

14h00 
C’est si agréable de faire ce qui me plaît, pour une fois, sans me soucier des autres. Je peux tourner à droite ou à gauche, explorer tout ce que je souhaite, quand je le veux. C’est une sensation exaltante d’être aux commandes. 

15h00 
Ça fait deux heures que je voyage comme bon me semble, que j’explore tout ce qui m’intrigue. Je commence à voir l’univers différemment. Je me sens transformé. Je me sens libre. 

17h00 
Je rentre de l’expédition métamorphosé. J’ai découvert le centre de l’univers. Il était en moi. 

18h00 
Je vais m’acheter des chemises qui ne se repassent pas. 
Pascal